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Sylvain BERNON

Juste avant l'overdose

Voilà bien trop longtemps que mon cœur dans le sien
palpite à la mesure d'une journée sans fin,
fonctionnaires de l'amour, que l'amour sonne faux !
J'ai beau lui dire « je t'aime » elle n'en croit pas un mot ;
quand elle laisse mes doigts naviguer sur sa peau,
c'est avec nostalgie qu'elle me tourne le dos...
Que l'amour nous pardonne d'avoir perdu le goût,
le goût de mes envies dans le creux de son cou.
Je me souviens d'un temps où nos yeux embrasés
embrassaient l'évidence de deux corps essoufflés ;
aujourd'hui fusionnés dans un seul et même nom,
nos désirs aux couleurs de la masturbation
se demandent trop tard où sont passées les flammes
qui cramaient autrefois l'intérieur de nos âmes
comme un rêve éperdu au milieu des regrets,
collé au quotidien de la neutralité.
Elle était la passion délicieuse folie,
j'avais pour ambition me noyer dans son lit...
Si nos lèvres se manquent à mesure de l'écrire,
qu'attendons-nous mon ange pour tremper les sourires
dans la fièvre oubliée de ces folles années ?
Otages tributaires de l'efficacité,
engavés au besoin qui délaisse l'envie :
cette envie de crier que nous sommes en vie !
C'est alors que mes yeux nous réclament une pause,
un arrêt sur image juste avant l'overdose,
qu'on appelle l'ennui pour enfin retrouver,
à l'appel de mes sens, un peu d'humanité,
qu'on éclate ces heures abonnées aux silences
depuis le triste jour point final de l'enfance,
arrêter la machine ravaler l'innocence,
souvenirs éternels de nos plus belles danses.
N'est-elle pas magnifique notre complicité ?
L'avons-nous en chemin un peu trop arrosée ?
Au point de s'y loger un seul cœur pour deux,
lorsqu'on se dit « je t'aime », qu'en pense l'amoureux ?
Qu'en pense l'horizon parsemé de projets ?
On s'efface chaque fois quand je dis "on" tu sais,
on n'attend plus que nous, là plus que toi et moi,
pour offrir à nos yeux le regard d'autrefois.
Celui dont les paupières n'ont pas su retenir
l'euphorie effrénée que procure un sourire,
que dirait-il au monde s'il voyait notre empire
accepter le meilleur comme offrande du pire ?
Que dirait-il à ceux qui nous ressemblent un peu,
déclarant qu'ils ne sont pas vraiment malheureux ?
De lessive en ménage la carcasse à l'ouvrage,
se répètent les jours comme tournent les pages.
Et pourtant je la vois se coller au sublime,
se glisser sous les draps protecteurs de mes rimes,
toujours à quelques doigts de plonger dans l'intime...
Orgasme pragmatique ! Me voilà sa victime.
Ô frissons garantis contre un peu de tendresse,
je vendrais père et mère pour sentir la caresse
qui fait battre mon sang au-delà des promesses,
jusqu'à perdre ma plume aux abords de ses fesses.
Si l'espoir imbécile veut remettre à plus tard,
le comment du pourquoi réécrire notre histoire,
si sont des lettres vaines, un poème de trop,
qui finit par lasser celle pour qui mes sanglots
sont tombés sous le charme effrayant du vertige,
si je pèse mes mots autant que je corrige :
regarde-moi partir, je n'attends plus que toi
pour aimer à nouveau quelqu'un d'autre que moi.