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Simone PASCAL

La Cremado /1

Dans les années cinquante, lorsque j’étais enfant,
Je courais, impatiente, au rendez-vous de l’an.
Traversant la montagne, faisant fi des vallons,
J’arpentais la campagne qui au Printemps sent bon.
Tombant sur les cailloux, les genoux écorchés,
J’étais vite debout… défrichant le sentier,
Je pressais mon allure, m’arrachais des buissons,
Pleine d’égratignures des bras jusqu’aux talons.
Enfin sur le plateau, je retrouvais la route,
Plein d’autos déjà là, bien garées, grâce aux Scouts.
Ignorant mon état de gosse échevelée,
Je ne faisais pas cas alors de mon aspect.
Encore quelques mètres… Et s’ouvrait devant moi…
La cuvette champêtre, objet de mon émoi.
Et là !… Pour mon bonheur, entre chênes et « cades »
Dans toute sa splendeur, se cachait… LA CREMADE.
Joyau de la Nature enfoui dans son écrin
De pins et de verdure et sentant bon le thym.
Alors sur un talus de cette « montagneto »,
Je choisissais la vue qui serait la plus nette.
Me laissant choir enfin, je savourais d’avance,
Dans ce petit matin, « ma Fête », « ma Provence ».
Un par un arrivaient les cars remplis de gens
Aux habits colorés, aux costumes d'antan.
Déferlaient des voitures, Niçoises et Comtadines,
Des Bourgeoises aux allures de riches citadines.
Des hommes aux cheveux noirs, au costume velours
Assorti au regard, arrivaient à leur tour.
Troupes gaies et dansantes, jeunesses, enfants, adultes,
Tous dévalaient la pente dans un joyeux tumulte.
Je respirais à fond les parfums dégagés
Des brins d’herbes qui font un tapis sous les pieds.
Les yeux écarquillés, je n’en perdais pas une,
J’étais émerveillée… plus de tristesse, aucune.
Tout en bas, dans le pré, des points multicolores
Formaient pleins de bouquets, mouvantes métaphores.
Puis je ne sais comment, des gens disciplinés,
L’affaire d’un instant, formaient le Défilé.
Tout s’arrêtait en moi quant « li Tambourinaïre »
Entonnaient, dans la foi, les beaux airs « dou Terraïre »
Tel un pèlerinage, les drapeaux, par dizaines,
Avaient, dans leurs sillages, taïoles et mitaines.
Avec solennité, avec recueillement,
Les micros annonçaient : Bienvenue ! Aux Présents,
Tout le déroulement du programme établi,
Tout en recommandant d’être tous très gentils.
Répétée par l’écho, voix chaude de Poète,
J’entends encor’ tes mots aujourd’hui dans ma tête.
S’enchaînaient les discours officiels, l’élection
De la REINE DU JOUR qui pleurait d’émotion.
Bien sûr, je ne pouvais voir de loin, sur ses joues
Les larmes qui coulaient… Je mouillais mes genoux…
C’étaient mes pleurs à moi… Malgré la joie au cœur ;
Etais-je?... au fond de moi?... Demoiselle d’Honneur?...