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Sébastien BROUCKE

Moi, j’irai !


Le diable allait zélé sans ménager la peine,
Et faisant son travail décimait à la chaîne ;
On lacérait des chairs, on fracassait des os,
On brisait des amours, on parlait dans le dos…

Le sang n’était pas tout, c’était bien plus cruel,
Les armes abondaient pour briser les mortels ;
Ils gisaient comme une outre, emplis de leurs douleurs,
Les fracasser, au fond, les vidait du malheur !...

Ce qui comblait le monstre : inventer l’engrenage,
Ces détails fins, subtils, engendrant le carnage.
Il se plaisait aussi à savourer l’effroi,
A déguster la peur jusqu’aux veines des rois…

L’ignoble côtoyait l’horreur, l’inavouable,
Et partout le bonheur jouxtait le lamentable.
Vivre était un périple, et trépasser le port,
Mais chacun redoutait le repos de sa mort…

Le mal courait partout, jusqu’aux sangs des meilleurs,
Et le pauvre attendait qu’un moins riche se meurt !
Ah ! Tout était misère, et dessous le soleil,
On n’avait pour tout bien qu’une mère qui veille…

Dieu descendait parfois dans les plaines herbeuses,
Où fleurit la prière en ses plaintes nombreuses,
Il bénissait sans cesse et, rythmant la nature,
Cadençait toute vie en battant la mesure.

Mais que pouvait-il faire au sein des mécréants,
La peine s’éteint-elle au murmure du vent ?
Ah ! Quel était ce jeu, quel était ce délire,
Fûmes-nous tous idiots, vaniteux, sourds, martyrs ?...





Ce soir je me souviens, je m’avançais, sincère,
Car mon âme d’enfant émouvrait Lucifer ;
Je ne pouvais songer, vu de ma position,
Que le mal en ce monde était sans solution !

J’allais comme tout ange oublier cet instant
Qui nous pousse à crier : « A mon tour maintenant ! »,
Et me jetant des cieux dans le corps d’un poupon,
Espérais fermement terrasser le dragon…

Mais lorsqu’on se réveille, on est ce petit d’homme,
Qui vient faible et vient nu, et dont l’âme va comme
Un fantôme esseulé dedans sa tour hantée,
Le regard implorant quelques nues dépeuplées…

On peut geindre ou prier, c’est vivant qu’on succombe
A cette humanité que peuplent tant de tombes ;
Il a beau se remplir de rêves étoilés,
L’homme meurt déserté du ciel qu’il a quitté.