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Roger VIDAL

J'avais huit ans

Mille neuf cent trente sept, j’ai huit ans, aujourd’hui
Je m’appelle Paco et ma sœur, Monica,
Dehors, il fait très beau, au ciel, le soleil luit,
On y voit des avions passer à grand fracas.
Je ne sais pas pourquoi, les gens se sont enfuis…
…Je m’appelais Paco, j’étais de Guernica.

Avril quarante trois, aujourd’hui, j’ai huit ans,
Je m’appelle Sarah, de famille Lévy,
J’habite ce quartier avec Moshé et Dan.
Les soldats sont venus, dans la rue où je vis,
Je ne sais pas pourquoi, tout brûle maintenant…
…Je m’appelais Sarah, j’étais de Varsovie.

Trois mars soixante dix, j’ai huit ans aujourd’hui,
Je m’appelle Thu Ping et mon frère est chidoï,
Mon école enterrée, reste ouverte la nuit.
La ville est embrasée, tout rouge est le Song Koï.
Je ne sais pas pourquoi, tout ce feu m’éblouit….
…Je m’appelais Thu Ping et j’étais de Hanoi.

C’est en quatre vingt onze et le onze janvier,
J’ai huit ans aujourd’hui, je m’appelle Hassad,
Dans les éclairs, la nuit, je joue au grand sorcier
Avec ma sœur Nadia et mon copain Harpad.
Ce soir, le Tigre est bleu et il pleut de l’acier…
…Je m’appelais Hassad et j’étais de Bagdad.

De quatre vingt dix neuf, c’est le dix huit avril,
J’ai huit ans aujourd’hui, je m’appelle Zangrade,
Plein de feux d’artifice, illuminent ma ville,
Je regarde éclater, avec mes camarades,
Ces étoiles couleur, qu’on appelle « missiles »…
…Je m’appelais Zangrade et j’étais de Belgrade.

De quatre vingt dix neuf, c’est le onze novembre,
Je m’appelle Louka, j’ai huit ans aujourd’hui,
Il neige, dans la rue depuis la fin septembre.
Il n’y a plus de toit au-dessus de mon lit
Et c’est un arc-en ciel qui éclaire ma chambre…
…Je m’appelais Louka et j’étais de Grosny.

Ils sont tous, les enfants de cette même terre,
Ils sont de quelque part et ils ont leur histoire,
Ceux des grandes cités, de Puteaux, de Nanterre,
Ceux d’Alger, de Taiwan ou de Côte d’Ivoire,
Ceux que tue à Gaza, Bahia, la bête immonde,
Ceux qui n’ont pas le temps d’entrer dans un poème
Car ils meurent de faim en arrivant au monde,
Ils sont notre reflet, ils sont d’autres nous-même.
Qu’ils soient Palestiniens ou bien Israéliens,
Qu’ils vivent à Changaï, la Havane, en Bohême,
Qu’ils habitent Rio ou en pays Malien,
Bien qu’ils soient différents, ils sont pourtant les mêmes
Car ils sont en naissant de TOUJOURS, de PARTOUT,
Les porteurs potentiels des humaines valeurs,
Laissez-les donc vivre ! Qu’ils soient de n’importe où,
Ils referont le monde avec mille couleurs.
Le 16 juillet 2009