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Roger VIDAL

A Vincent

Au temps où les communs se mettaient en communes,
Quand l’ogre dévorait les enfants dans les mines,
Tu passais sec et gris, entre terres et lunes
Tout en peignant la vie de scènes qu’enlumine
Le regard du génie aux faims et aux famines.

Quand Joris Karl Huysmans balbutiait ta peinture,
Toi tu allais ainsi hors de tous les pouvoirs
Et ce grain de folie planté en ta nature
Te servait, au-delà de ce qu’on pouvait voir,
A saisir l’infini sans même le savoir.

La Provence est partout de Saint Rémy en Arles,
La lumière absolue d’un monde assourdissant…
Ah oui j’ai lu Prévert quand de toi il nous parle
Étranger parmi nous en ce soleil passant,
L’homme toujours dressé « de phosphore et de sang ».

Qui se souvient encor que tu fus prêtre ouvrier ?
Et plus ouvrier que prêtre au coeur du Borinage,
De ces deux vocations aux parcours contrariés
Ta vie si torturée est le seul témoignage
Peintre des exploités dont peu d’espoir surnage.

Juillet a maturé les blés qui sont de feu
Et le ciel pourtant bleu est une nue d’orage,
Le souffle de la vie, de la mort ou des deux,
Passe dans le décor où le vent du naufrage
Emporte la raison des souffrances sans age.

Il est dans ce champ là comme un dernier brûlot,
Comme un deuil pressenti où le corbeau se lève,
La terrible beauté de l’ultime tableau
Elle reste en mes yeux sous la bulle qui crève
Et je dérive loin, jusqu’au bout de ton rêve.

Le 14 février 2010