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Roger VIDAL

A Pierre

Quand il perdit le nord en ce jour de naufrage
Ce ne fut pas que deuil ou chagrin éprouvé
Passager de hasard qui au bout de son âge
N’avait d’autre destin qu’exil de réprouvé
Il crut qu’il ne pourrait jamais se retrouver.

Il cherchait dans la nuit et au cœur du silence
Même pas la lumière et même pas un cri,
Mais simplement une ombre un petit peu moins dense
Et tu étais je crois l’île de ce proscrit,
Voici ce que pour toi jadis il a écrit :

A Pierre
Il s’éveille et je le regarde,
Je devine au fond de ses yeux
La fin d’un rêve merveilleux
Et doucement je me hasarde
A lui dire des mots heureux.

La petite lueur qui tremble,
Dans son regard je la connais,
Tu la lui as abandonnée,
Elle est de toi, il te ressemble,
C’est l’enfant que tu m’as donné.

Il grandit dans notre maison,
Raisonnable et un peu passif,
Parfois timide ou bien craintif,
Analysant avec raison
Mais souvent, trop souvent pensif.

Sur la porte de la cuisine,
Nous avons inscrit patiemment,
Ses mesures au fil des ans
Et par ces marques, on devine
Comme il lui tarde d’être grand.

Oui, il grandit dans la maison,
Rempli parfois d’impatiences,
De mouvement ou de silences,
Pour ce qui est de la raison,
Tu demeures la référence.

Ensemble nous serrons les dents,
Ainsi nous survivons un peu,
Tu vois la vie à petit feu,
C’est supportable maintenant
A condition qu’on joue le jeu.

Et puis nous nous serrons les coudes
Et de nous, nous nous occupons,
Il m’interroge et je réponds,
L’amour je crois, l’amour nous soude
Cet amour qui te correspond.

Et parfois je lui prends la main
Alors la route est moins aride
De ma tête s’en vont les rides,
Nous parlons d’hier, de demain,
Ta place est là immense et vide…