Du fond du moyen âge et d’encore plus loin, Son destin est lié au notre avec constance Et il trouve toujours, dans le moindre recoin, Son compte à côtoyer notre propre existence.
Des cales de navire aux boyaux des égouts, Il est de nos bas-fonds l’habitant à la page, Souvent inspirateur de craintes, de dégoûts Et de superstitions noircissant son image.
Désigné de longtemps comme le grand vecteur De la rage ou la peste, impardonnable crime, Il faut considérer que le propagateur En est également la première victime.
S’il a occasionné jadis bien des dégâts Dans nos garde-mangers, il dès lors main basse, Arpentant les réduits qui sont ses galetas, Sur nos nombreux déchets dont il nous débarrasse.
On peut lui reprocher de souvent grignoter Nos câbles, nos papiers, habitude gênante, Mais enfin il n’a pas choisi d’être doté D’incisives poussant de façon permanente.
Connaissant la vigueur de sa reproduction, Nous craignons de sa part qu’une invasion survienne Mais il sait limiter sa surpopulation, Nous ferions aussi bien d’en prendre de la graine.
Si de tous ces griefs, nous savons l’oppresser, Lui-même à notre endroit peut faire des histoires Dans un tribunal où il viendrait dénoncer Son état de cobaye en nos laboratoires.
Qu’un tel procès se tienne, il faudra assumer, Si le juge suprême à son terme décide Que notre genre soit à jamais diffamé Pour avoir perpétré ce quasi génocide.
