Vos
poèmes

Poésie Française : 1 er site français de poésie

Vos<br>poemes
Offrir
ce poème

Renaud BOSC

La palombière

Le rustre a fait monter la belle en son repaire,
Gravissant à sa main les échelons de bois
Ligotés de raphia jusqu'à la palombière
Où souvent, il se tînt posté en tapinois.

Mais ce soir ce n'est pas pour tirer la palombe
Qu'il est venu ici, le coeur plein d'émotion,
Mais pour faire l'honneur à celle qui succombe
A sa cour timorée faite de dévotion.

Car elle ne sait plus, la belle institutrice,
Ce qui l'a attirée chez cet embarassé,
Sinon la perdition émanant du novice
Et qu'elle ne croyait plus devoir caresser.

Le perchoir camouflé n'est pas un nid douillet,
Le parterre inégal, fait de planches grossières
N'a rien d'un lit moelleux pourvu en oreillers,
Mais pour l'heure, ils n'y voient que couche hospitalière.

Avec des gestes lents et qui osent à peine,
Ils essaient d'enlever leurs habits disgracieux,
Pratique délicate aux amants qui s'apprennent,
Car cause quelquefois de freins malencontreux.

Dans les mailles serrées du soutien-gorge noir,
Il ressent l'oppression des seins incarcerés,
Et ces deux globes chauds enclins à s'émouvoir
Lui rappellent la peur des ramiers capturés.

Pourtant ces oiseaux là sont autrement fragiles
Et réclament des soins d'un genre bien distinct
Que les vagabondants et frileux volatiles
Qu'il a pour habitude, ici, d'avoir en mains.

Mais le bougre, d'instinct, trouve la juste poigne
Pour les amadouer et pour les délurer,
Et les soupirs naissants de la belle en témoignent,
Qui le laissent surpris et tout désemparé.

Aussi, sur ces apprêts, prend-elle les devants
Pour faire à ce timide un morceau de conduite
Vers les champs azurés pleins d'adeptes fervents
De la joute charnelle et sa fureur induite.

Il se laisse guider, confiant et encensé,
Une pluie de cheveux s'abat sur son visage
Avec des mots sucrés, à lui seul adressés,
Qu’il prend comme le plus attachant des ramages.

Ses bras sont refermés, frémissants et comblés,
Sur ce corps convoité aux courbes enivrantes
Que la lampe tempête inonde de reflets,
Ménageant par endroits des ombres engageantes.

C'est la plus forte image et la plus enchantée,
Avec celle du vent faisant bruire le lierre,
Qu'il garde au souvenir de cette nuit d'été,
Toute entière passée dedans sa palombière.