Vos
poèmes

Qui veut accoucher d'un poème
Se doit d'apprivoiser les mots,
Démontrer combien il les aime
Dans un mode pianissimo.

Il doit faire oeuvre de patience,
De sensibilité autant,
Pratiquer la persévérance
Sans être chiche de son temps.

Moi qui suit parmi les adeptes
De cet étrange activité,
Voici en tout cas les préceptes
Qui m'aident à m'y conforter.

S'il faut parler par métaphore,
Je me vois comme un oiseleur
Qui, dans sa pensée élabore
Des pièges pour fameux siffleurs.

Mais au lieu de gaies alouettes,
De rossignols ou de pinsons,
Moi, ce sont des mots que je guette
Pour les mettre dans des chansons.

Et c'est souvent une gageure
De les rassembler pour le mieux
Afin qu'aucun d'entre eux ne jure
Et que leur chœur soit harmonieux.

Car ils sont timides les drôles,
Ils restent cachés dans leur coin,
Récalcitrants à tout contrôle,
Et me laissant dans le besoin.

Ma technique pour les séduire
Tels de craintifs petits oiseaux
Est de rester figé sans bruire,
Arbuste aux accueillants rameaux.

Avec ce truc, j'ai une chance
De ne pas trop les effrayer,
Qu'ils s'habituent à ma présence
Pour se remettre à gazouiller.

Par ce modique stratagème,
J'ai bon espoir d'en avoir maint
- Afin de boucler mon poème -
Qui viennent manger dans ma main.