L’atavisme du singe
L’origine de l’homme a beau faire débat
Et les théoriciens se creuser les méninges,
Si l’on veut mon avis, je ne discute pas :
Nous sommes composants de la tribu des singes.
Outre un proche ADN, à cette heure certain,
La mimique et le geste ayant même façade,
Nous partageons aussi le viscéral instinct
Qui est de pratiquer avec art l’escalade.
Quand des frères humains, en haut d’une paroi
De roche ou de building, recherchent leur Olympe,
Moi sur le végétal, je me sens plus adroit,
Dès que je vois un bel arbre, il faut que j’y grimpe !
Bien que ne dédaignant pas la quête des fruits,
Ni même à l’occasion, dans les nids, le pillage,
C’est le plus fréquemment pour des frissons gratuits
Qu’on peut me voir hanter la sphère du feuillage.
Il s’agit de doser l’obstacle du regard,
De la paume, flatter le grain de son écorce,
Sélectionner la voie et se montrer roublard
Pour s’affranchir du sol sans gaspiller sa force,
Dans le vert printanier ou les ors automnaux,
Repérer les poignées que les branches recèlent
Afin de s’élever vers de souples rameaux
Qui ondulent dans l’air et sous mon poids chancellent.
Et pour que ma technique évolue peu ou prou,
J’apparente le singe à mon maître fidèle,
Le macaque est un crac, le sapajou foufou,
Le gibbon super bon, l’atèle mon modèle.
Qu’ils m’entraînent chez eux en bondissements prompts,
Et avec cette vive allure chaloupée,
Me fassent découvrir entre lianes et troncs
Les chemins pour monter jusqu’à la canopée,
Et là dans le soleil et le souffle du vent,
M’initient au métier périlleux d’acrobate
Pour devenir acteur de ce milieu mouvant
Et me permettre ainsi d’y imposer ma patte.
