Gitons
Savez-vous, bien chères sœurs,
Qu'il existe des endroits,
Où l'on parfume les fleurs,
Quelque part dans les bois.
Ne partez-pas sur l'heure,
Point, vous n'en cueillerez.
N'ayez pas de rancœur,
Je vais vous expliquer.
Dans le monde, aujourd'hui,
Il est, des hommes étranges,
Menant une double vie,
Qu'on traîne dans la fange.
Attristé par leur chair,
Ils s'emploient à changer
Pour attirer leur pair,
L'affreux colifichet.
Ne riez-pas mes sœurs,
De cette dure vérité.
Ils ont bien des malheurs,
Qu'on ne peut consoler.
Ils composent chaque soir,
Leur corps d'une peau douce,
Leurs yeux d'un grand espoir,
Pour plaire sur la mousse.
Et la nuit, en été,
Dans l'ombre des barbeaux,
Ils foisonnent par milliers,
Aguichant les badauds.
Et l'hiver, apeurés,
Par d'avides ruffians,
Ils approchent la cité,
Sous leur robe de mendiant.
Ne vous moquez pas, sœurs!
Souvenez-vous du temps,
Où les grandes chaleurs,
Unissaient vos talents.
