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Philippe DECROIX

La rose et l'hiver

Il était une fois, une rose coquette
Préparant sa sortie au printemps renaissant.
Sourire dans les yeux en voyant ses emplettes
L'inventaire elle en fit le ventre frémissant.
Puis, délicatement, au premier des flacons
Pris un peu de poudre pour farder ses pétales.
Déroba au second une once de flocons,
Couvrit ses étamines au parfum de santal,
Souligna son regard d'un fin trait de couleur,
Saisit un bâtonnet de rouge vermillon
Pour tracer sur son cœur des rayons de chaleur,
Mis enfin sa robe telle une cendrillon.
Aux clameurs de la foule au vu de sa beauté,
Elle livrait au vent sa voilure légère,
Enivrant les passants dans ces journées d'été
Où les esprits peignent des pensées éphémères.
L'hiver,
Le visage grave, semblant indifférent
Aux vastes solitudes engendrées sous son règne,
Attendait l'air glacé la venu de son temps,
Étendant son silence aux âmes qui s'éteignent.
Il vit au loin la rose aux couleurs éclatantes,
Distribuer la joie, danser pour un sourire,
Accepter la douceur d'une main caressante
Sous le regard tendre des amants qui soupires.
Des notes percutantes emplirent sa poitrine
Déchirant sa froideur d'habitude de mise.
Il n’eut de cesse alors, pour cette figurine,
De tisser un manteau plus fin que la banquise.
D'un geste très précis, il découpa la neige
Pour faire le bâti de ce splendide ouvrage.
De fines gouttes d'eau assemblées en cortège,
Il dessina des frises aux doux reflets volages.
Colora de givre les bords d'une rosace
Composée de cristaux limpides et flamboyants.
Cueilli au plus bel arbre une larme de glace
Pour servir de fermoir à l'habit chatoyant.
La rose émerveillée fit éclatée sa joie,
Se vêtit du présent et embrassa l'auteur.
Un frisson de chaleur dévoila son émoi,
Et un peu de couleur lui donna le bonheur.
Se tenant par la main, ils prirent le chemin
Des jours assurément rayonnants et sereins.
Au bout de quelques pas d'étranges sensations
Oppressantes et troublantes envahirent la rose.
La pâleur s'étendit couvrant ses émotions,
Et sa marche engourdie dû marquer une pause.
Le temps ralenti, ses yeux supplièrent
Ses doigts crispés se figèrent
Son cœur lent frissonna
Le son cessa
Et rien.
L'hiver fut parcouru d'un glacial désarroi,
D'espérer cette vie d'une reine et d'un roi
Et de n'avoir construit qu'un macabre silence
Rempli de solitude comme lourde sentence.
Il s'en alla rejoindre un monde en noir et blanc
Ou les pierres sombres vous regardent et se taisent
Laissant passer le temps sous un voile troublant
Et enserra la vie entre deux parenthèses.