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Olivier AUGE

Au claire de sous la Lune

La voûte est haute, il n'est pas d'heure, allez viens!
Allons exposer nos peaux sous le luminaire de pierre.

Pendus aux paupières de la Lune
Un de ses cils dans chaque main, pas loin des joues,
Sondant les portes, bonnes heures de l'oisiveté,
Nous sommes accrochés, intrépides,
Aux manches de ces parasonges troués
D'où perlent des étoiles, épleurées sur nos fronts.

Les yeux grands fermés, pour le colin-maillard du soir,
Il fait bientôt beau dans nos têtes, déjà,
Et comme toujours, là où le noir se fait bleu,
Le ciel nous joue alors un air de valse en mi dièse.

Oh! Le vent prend nos pieds pour les siens!
Deux grammes de nuages, trop flous, se bécottent entre nous,
Et, sous les cheveux mêlés de notre sommeil éteint,
L'horizon se déguise en jour,
Bien que le soleil en soit loin.

Vas-t-en tourner ailleurs Chronos!
Les roues de ton chariot nous gâchent la musique
Et rayent les sillons du disque de la nuit.

Tes dormeurs sont rangés dans des boites à coucher,
Ils défont et refont sans en garder la trace,
Les mailles de leurs journées
Comme s'ils attendaient Ulysse.

Au dessus d'eux,
A bout de bras liés au blanc d'un croissant perché,
Comme deux larmes de Pierrot,
Comme deux poètes en l'air,
Nous miront, lacets en poches,
La chutte de nos souliers
Qui s'en vont libérer, en cassant quelques tuilles,
Nos pas perdus-trouvés là où il n'y a de sol.

Nos langues, en choeurs, s'enfarandolent,
Imitant joliement la fin du bruit liquide
De notre urine qui, joyeusement, s'enfuit,
Pourfendant l'espace et les airs
Pour rencontrer en bas la Terre.

Pourtant, les villes d'ici,
Patiement en transit au fond d'un sablier,
Nous voient sans sourciller.
Plus de sourcil au dessus des marteaux,
Plus de vie autour des outils,
Elles voient les hommes tout petits,
Ces grosses dames, rétines vides,
Elles voient les hommes tout petits,
Les villes
Les villes qui ne nous savent pas.

Mais en attendant que quelqu'un les redessine,
Pisser dessus, depuis la Lune, peut rendre la vue poétique.

Olivier Augé