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Noël METALLIER

Lettre à Charles Baudelaire

Croyez-moi, je vous prie, cher Monsieur Baudelaire,
Je ne crains pas les vents, non plus les vastes mers,
Mais plutôt, je l'avoue, les hommes d'équipage
Dont la futilité peut gâcher mon voyage.

Toujours, je le promets, je chérirai la mer,
L'écume sur ses flots et ses gouffres amers,
Car elle est poésie, si dense et si profonde,
Ses abysses me sont chers car nul ne les sonde.

Je m'enhardis alors, j'écris sur un miroir
Où se reflètent, bleus, mes cris de désespoir,
Et, bien que n'ayant pas encore atteint mille ans,
J'ai trop de souvenirs pour aussi peu de temps.

Pareil à l'albatros qui survole les flots,
Je plane haut, si haut, et par-delà les mots.
De ma plume je fais la rime aux blancs nuages,
Mes vers, en lettres d'or, scintillent sur mes pages.

Je suis souvent d'humeur badine ou vagabonde,
Je déclame haut et fort, aux quatre coins du monde,
Les beautés d'un matin ou d'un soleil couchant,
L'horizon est désert, hélas, nul ne m'entend.

Tu m'avais averti, c'est vrai, mon ami Charles,
À présent je connais la douleur dont tu parles,
L'évidence s'impose à mon orgueil blessé :
Mes ailes de géant m'empêchent de marcher !


Août 2017