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Mohand-Raschid SEKARNA

L’âne et le bœuf

L’âne se surpris un jour de rêvasser
Que le bœuf jouissait d’une grande liberté.
Son maître, c’est toujours lui qu’il prenait
Dans les prés et les champs, ils s’en allaient
Pour ne revenir qu’à la nuit tombée.
Jamais il ne s’était imaginé
Que comme un esclave, le bœuf trimait
Pour que les semences puissent pousser
Et de son labeur, permettre à tous de s’alimenter.

Une nuit de fin d’automne à la veillée,
L'âne et le bœuf au fond de l’écurie,
Engagèrent ce conciliabule après s’être assoupis :
-« Parole de grison, sans te paraître empoté,
Notre maître pour un festin veut te destiner ».
Le bœuf à l’audition intéressée,
Senti son sang dans sa tête remonter,
Demanda conseil à son ami le baudet,
L’orienter et décider du plan à adopter :

-« Dans ce cas, mon devoir est de t‘aider
Je te plains en toute sincérité ;
Demain quand le maître dans la matinée,
Viendra te prendre au champ travailler,
Tu feras semblant d’être harassé,
Tu feindras tes pattes paralysées, la fatigue t’accabler,
Ta ration d’orge, tu ne devras pas y toucher ».
La stratégie était toute étudiée,
A la lettre, les conseils furent enregistrés.

Le fermier, dès le matin à son arrivée,
Constata le bœuf incommodé
Et l’orge pleine l’assiettée.
Il prit cette décision à la volée,
De substituer le bœuf par le baudet,
Avec l’âne il décida d’aller labourer.
Au petit jour, il emmena le cher baudet,
A la lourde charrue il l’a attelé,
Du matin jusqu’à la fin de la journée.

L’âne, le soir à l ‘écurie lorsqu’il fut rentré,
Sentit son corps fatigué et prêt à se disloquer,
S’aperçut que cette pitoyable idée,
N’allait rien pour lui arranger,
Et que pour un conseil, il avait bien fauté.
Pour se libérer de cette piètre épopée,
Il inventa une sournoise échappée,
Et au bœuf sans tarder, l’a proposée :

« Bœuf cher ami, hier je me suis trompé,
Ecoute : demain, le maître dès son arrivé,
Debout tu te mettras sur tes grands pieds,
Pour aller au champ travailler,
Car je l’ai surpris à sa femme adresser
Les bribes d’un long discours qui me déplaît,
Disant que toi malade, le sort était jeté,
Que le grand jour de festoyer était arrivé
Et qu’il fallait absolument t’égorger ».

A cette nouvelle, il fut dépité et épouvanté,
Mais son courage, il put le rassembler,
Implorant Dieu de lui épargner
Cette pénitence, lui, l'opprimé.
Il exécuta les orientations sans râler,
Permettant ainsi à notre cher baudet,
Ce donneur de conseils mal fondés,
De dormir et se soustraire à toutes activités.