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MBIN Gustave

Jean le Pêcheur…

08 mai 1993 Yaoundé Cameroun

Avait-il seulement su qu’il pêchait,
Ici dans le grand Lac municipal,
Ou croyait-il là à ce qu’il pensait
Avant d’entrer dans la Capitale ?

O Ciel ! Jean devenait un pêcheur,
Pour chasser et tenir de bons requins,
Et si son beau teint perdait des couleurs,
Il savait pouvoir trouver du bon vin,
Auprès des braves du Canton,
Qui avaient longtemps été médusés,
Quand il leur racontait dans sa chanson,
Son rêve de bâtir de grands musées.

Vingt six levés de soleil pour ce mois,
Jean et ses frères ont vraiment souffert,
Et aujourd’hui jurent par leur foi,
Pouvoir mettre les requins sous couvert.

Le Lac Municipal est tout calme,
En cette belle journée du jeudi,
Mais Jean veut faire les frais d’un drame,
Tout près de la route, risquant sa vie.

Vers le Lac encore vide de gens,
Jean a déjà fixé son hameçon,
Sa vision hors des limites du temps,
Tous ses frères lui ont donné raison.
Et très loin, à plusieurs miles de là,
Tous les autres marchaient et chantaient,
Que leur « LAH » sortira du coma,
Que la Crise mourra à jamais,
Quand juste pêche sera terminée,
Et dans son grand et profond carton
Jean tout content, aura ramené,
Les requins qui massacraient le Canton.

Ici tout près du Lac, derrière Jean,
On avait fait une grande foule,
Jean tout sérieux, fixait parfois le néant,
La foule le jugeait dans son rôle.

Quand l’hameçon paraissait retenu
Sous le Lac, il levait très haut le poing,
Content, croyant un requin retenu.
Et des voix s’élevaient dans tous les coins,
Et tous chantaient en choeur : « Jean le pêcheur ! »,
Là, ils clamaient sans peur : « Jean le Sauveur ! »,

Partirent dans des marchent dans la rue.
Le Maire des abords du Lac averti,
Leur fit dire leur mauvaise tenue,
Jean fut arrêté, jugé, condamné…
Frères et enfants ont beaucoup pleuré….

————

A cette époque-là, j’avais vingt ans,
Je pouvais encore rire de mes plaies.
Qu’avais-je à faire de plus plaisant ?
Je fus donc de la partie par les faits.

C’était pour mes aînés presque un devoir,
Pour moi l’âge des folles grandeurs,
Qui vous colle amour et désespoir,
Et vous laisse cet air de grand rêveur.

Je convins donc de suivre le fanal,
Huant les requins et vantant le pêcheur ;
Et ces sages moments dits sans égal,
Jugés par tous ces gens d’ailleurs,
Gardaient longtemps du feu à mes poudres…
Peut-être ai-je encore tiré,
Et ce, pour ne pas comprendre,
Encore que je crois avoir cassé !

Aujourd’hui me refaisant mes vingt ans,
Je me revois à la sortie du procès.
J’avais espéré un regard de Jean ;
Car on le condamnait pour mes excès.

Autant que lui, j’avais voulu pêcher,
Et avant lui je crois certains l’ont fait,
Mais seul Jean pouvait être condamné.
On le bousculait et moi je le regardais…

Puis mes copains et moi avions pensé,
Dans sa prison lui porter à manger ;
« Jean le pêcheur ! », (« Jean le Sauveur ! »)
Nous avions chanté,
Pour qu’on puisse vite le libérer…

Et,



Avait-on seulement su qu’on pêchait,
Aussi dans le grand Lac Municipal,
Ou croyait-on là à ce qu’on pensait,
Avant d’entrer dans la Capital ?

O Ciel ! Je devenais Pêcheur,
Comme Jean et tous mes copains aussi,
Médusés, nous avions perdu la peur,
Nous voulions la paix en risquant nos vies.

En ces jours, le Maire gardait le Lac,
Étions-nous alors conscients du Danger ?
Je n’eus à aucun moment le vil tract,
Il fallut dans la foule se ranger,
Elle cadençait au rythme des soldats :
« Jean le Pêcheur ! » ; « Je suis aussi pêcheur ! »
Dans nos rangs on se tenait par le bras.
Traversant le site des non-pêcheurs,
En observant des filets de requins,
Délaissés ça et là depuis bien de temps,
Et de vieilles Dames-jeannes de vin,
Je me surpris pensant qu’à certains temps,
Le Maire avait pêché dans le Lac,
Autant qu’il avait pu et sans chanter.
Pensant à quoi aurait servi le bac,
Je me dis que le Maire devait chanter.

A ce moment, je fixais fort le néant
Je venais de comprendre mon rôle,
Mais là, seul le vent me rappelait Jean…
Après la fin d’une farandole,
On perd de vue les couples de danseurs,
Et sur la scène, on a les lauréats,
Et ce sont là peut-être les vainqueurs…
J’étais seul dans la rue, rêveur et béat.

Pourtant mon hameçon fut retenu
Sous le grand Lac le lendemain au soir,
Content, croyant un requin retenu,
J’entendis grandir mes fous espoirs,

Et des voix s’élever de tous côtés :
Tout en chantant en chœur :
« (Jean) C’est le Sauveur ! »
Mais la pêche ne put se terminer,
La maire perdit beaucoup de couleur
Il me prit de courage et de foi,
Du sérieux, de ruse et de prière,
Pour fuir le châtiment de cette « Loi.»
De moi, le Maire fut drôlement fier,
Et… m’envoya chercher tout en couleur.
Alors je demandai à mes geôliers
Ce qu’on endure à rester pêcheur,
Muets ou sourds, ils ne purent me parler ;
A l’intérieur je humais des odeurs,
Le Maire nous servi du requin,
A sa table comme menu du jour.
Je fis de l’oeil à mes copains ;
Rien ! Dans leur plat il y avait un amour,
Véritable dogme de nos siècles,
Je pus saisir de ruse le piège,
D’une pensée je fus hors du cercle,
Qui fit de mes copains nos « VRAIS » mages,
Au haut du Canton, on les décora,
Puis ils firent présentés « Pêcheurs »,
Pour leurs gardes, ils eurent des soldats,
Et acceptèrent le tout sans douleur…

Ne rien penser et surtout rien dire,
Si la pêche avec Jean fut « gaieté »,
Au maire elle n’a fait que nuire.
Si le « vrai » meurt dans la légalité,
D’une justice sur des pêcheurs,
Mes copains nous font chanter des chansons (leurs chansons)
Nous promettant des requins au dessert,
Et tous nos pères leur donnent raison.
La raison, la chanson, la déraison,
La valse des braves gens du Canton.
Qu’est-ce que d’être pêcheur ??

Fin

08 mai 1993 Yaoundé Cameroun