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Loïc Decrauze

L’éon et sa lie pure

Foutre, qu'elle est délicate !

Toute blanche, toute l'ivresse toute suave de ses émois. Gambade sur ta terre, charmante, ouste ! Je te vois, coquine, essouffle un peu ton corps que j’oie le feu des orifices, saute, élève-toi, tombe vers moi ­- non ! Populace au gras du ciel ou reine de ta motte flottante, fragile. Sur ta couche étale ces beaux attraits, douce vermine. Misère que la création, l'action est où, où cette frénésie vous foudroie-t-elle ? Com­mun, je trahis. Mort, pourquoi non, pour que les assauts venteux soulèvent ma pierre tombale, bancale, et qu'ils sèchent ta langue sur mes os. D'un soir nous fûmes putréfiés. Pourquoi non ? Au signe de ta substance, j'effleure ses antres. Tout l'à-coup érige nos formes et je crois étreindre l'esprit. Le petit capucin au sein du cloître quête sa confusion, moi, je veux mon désir. Ça suinte, la friponne qui mignote mes tripes m'inspire.

Foutre, où est la perfection ?

Au lieu de ma pensée
Quatre murs vierges s'assemblent.
Pour moi tout ça !
Tout à l'aboi,
L'instinct obscène,
Telle la meute citadine
Aux gonades hérissées, aux canines pendantes,
Qui piétine ses chairs
Et qui cherche ses ruines.
Argh ! Je concentre mon néant, drôle !
Et s'il chuchote, chatouille-toi les entrailles.
Petits petites écœurés, je titille le mot
Et je l'ai mon impression confuse.
Grâce, ô déchirure.
Graisse, d'os en naissances.
Je me mute, me mute, sème ma genèse
Et yeap ! je le sens ce petit chaos
Qui modèle les tréfonds de ma cervelle.
Et jute... Âme !
L'empreinte fluette de ce tourment
Titube sur sa quintessence,
Se brésille en son prolongement,
Et des flous effilés incisent sa profusion.
Pas d'infini, pas de monotonie,
Pas de sphère.
Des coins, des refuges nauséeux !
Que ça grouille de règles et d'arêtes !
Je crée mon angoisse par le cube...
Non !
Je forme mon cube par l'angoisse...
Ne sais pas, point, non !
Ignare d’artiste, tu broutes, tu broutes,
Tout est déjection alors ?
Je suis. Dans
Le cube lisse à la pâleur hospitalière
Recroquevillé en un coin
Un nourrisson
Branlant. Mon corps nu
Qui pendouille, informe,
Je l'étire. Près de
Quelque fange en furie
Les crapauds copulent. En moi
Je décrypte l'indécence
De mon complexe. Figé des sens
Le pitre s'échoue tel un membre rongé.
Voilà de quoi nourrir mes vers.

Et quoi ! Quoique je siffle
Un fond de théorie, piètres emphases,
Je me dresse gaillardement. Tudieu !
On me contredit, laide loque ?!
Piffard cagneux, on se rebiffe !?!
Soit. Je ris.
Peuh ! Les ripetons se choquent et je ris,
Me marre pour que chiale le « cul pincé » !
Poil de vierge dans la narine ? Même pas !
Croulant, la bedaine...
Bien, je le dis: suffit l'aliéné !
Encore aurais-je barbouillé
Ma pestilentielle rose des vents
De cinquante ou soixante-dix hivers,
Je pourrais piétiner notre trou, grevant
Le tout plein des gargouillements amers.
Eh bien non !
Ce doux chérubin égrené de ses appâts
Rêve, oui rêve un instant :
De la fraîcheur d'une maisonnette
Les feuilles .se déploient
Et les pastels lèchent mon âme.
Je suis là, de là à l'infini,
Étourdi de sens, de violets en violettes
d'indigo en bleuets
de bleus en ruisseaux
de verts en verdures
de jaunes en boutons
d'orangés en épidermes dorés
de rouges en eaux battantes du coeur.
L'arc bandé au ciel, les sucs s'écoulent,
Mais je reste dans le cube.
Voilà de quoi pétrir corps et fantasmes.

Au centre d'un pan, je fixe un autre pan.
La forme n'éclate pas, je compose ma face.
Béate, la bouille. Hilare, l'hilote
Exsangue,
A croire que mes rondeurs sont écartelées !
De la fente, tantôt je beugle, tantôt bougonne
Les babils d'égrotant incongru.
Et les châsses !
Naïfs, pervers ? Expressifs pour qui ?
Je traîne les membres
Et m'affale, tout contre le pan.
A-y-est, mou jusqu'au trognon,
Des dégoûts étouffants écrèment le temps,
Le temps à moi qui ne coule plus,
Il se répand.
A-y-est, je le sens,
Soumis au volume, je le suis.
Je retourne au centre.
L'ordre est remis, l'être est nouveau.
Et les châsses !
Oui ! Maintenant je les grogne obstinés,
Effrayants, l'étincelle livide,
Ils s'agitent de tous côtés,
Parcourent les arêtes,
Se butent à chaque coin,
Loin, loin de l'autre et de
Chacun ils se sentent la proie.
Je bave en ce sens un autre coin
Et je touche le pan d'un panard,
Et même de deux !
Miracle, rage...
Au fond... je sens le foie nécrosé.
Ben, tu dérives, grosse légume !
Je sens la foi pénétrer...
Ohh !!! Doigt de Dieu...
Poussons jusqu'à l'offrande.
C'est ça ! je suis offrande,
Immolons, vingt dieux !
Je frémis,
La fibre galvanisée, le nerf frétillant.
Je, oui! L'essence de Dieu
M'imprègne, chouette la plénitude !
Je me sens tout au faîte originel,
Grâce! grâce !
A-y-est ! Je lâche les gaz !
Et fonce !
Vite, vite, je trotte, galope,
Tout beau,
La bave s'effiloche,
Et le crâne baissé,
Ma courbe prend vitesse,
Oui, je veux m’étirer,
Et tirer encore le coup !
Je veux m'approcher,
Accrocher ma trogne à ce plan !
Et encore, encore, je veux
VLAN !!!
Le pif et le front embrassent le pan.
Pousse ! Ecrase le reste !
Et VLAN !!!
Le pan poche lèvres et châsses.
Le cube tremble.
Le sang coule, épais.
Et quoi! Alors !
C'est parfaitement dégueulasse !
On est heureux du fatras, méprisable souillon ? Hein !?!
Et poétique ce Hein ! ...de Dieu !
Que va-t-on me glousser ?
Une oeuvre, ça une oeuvre !?!
Abstraite ? En plus !!!
Et du grand art ?
Quoi ! Du grand art par le don de ton corps et...
Ah non! fripouille !
Ne viens pas me susurrer que
Le corps du pinceau
A goûté les couleurs de ton âme :
Ah non! Ou je t'achève.
Et puis putain, chiasse de toi !
M'en fous !
Bousille-toi la tronche !
Echarpe ton faciès d'ahuri !
Pisse ton sang, expie sa crasse !
- Moi, je contemple et trépasse.
Parfaite la face,
Superbes ses plaies...
Et tout, vraiment tout.
L'ensanglanté, les tachés, les collés et le sanieux.
Aucun goût ce garçon !
Voilà de quoi pourrir mes extases.

La créature ne bronche pas.
Avec ce que j'ai chopé dans la gueule !
Seules tremblotent les lèvres de quelque plaie.
Pourtant, je pourrais me permettre un petit hurlement,
Un rien bruyant.
Une frêle clameur de ma douleur, non ?
Un peu.
Et même - Dieu me pardonne - ­
Hurler à en perdre sa luette !
Rugir à s'en faire péter les cordes !
Vagir sa souffrance ! quoi !
Ma sensibilité doit être affectée, non ?
Et le sens tactile, il fonctionne encore, non !?!
Non.
A terre, châsses ouverts
Et fixes,
Je tape le pan,
Et tape au rythme des gouttes de sang,
Encore, vite et plus vite encore.
Obsé..., obsé..., obsédé l'animal.
Puis il tremble,
Tremble au rythme du corps qui se purge,
Encore, vite et plus vite encore.
Alié..., alié..., aliéné épileptique.
Bon. Cela ne me suffit plus.
Le cube était propre,
Un peu de sang, mais pur,
Comme sur l'autel encore chaud du sacrifice.
Voilà que je gerbe.
Dans une sérénité extatique
Je laisse couler la déjection buccale.
Atroce.
Au gré des évacuations glaireuses
Je lorgne de-ci de-là
Quelques éclaboussures verdâtres
Pénétrer le sang frais.
L'aliéné, lui, n'est pas en reste :
Je me délecte du mélange organique.
Délice.
Et allez ! Plonge tes pattes !
Patouille dans tes vomissements fielleux !
Tout à mes intérieurs
Il me faut achever la vilenie du corps.
Je l'effectue, crispé.
Pas par malaise ou par peur, non...
Par nécessité.
Je chie.
Et bien ! Puissamment !
Les protubérances prolifèrent du côté du rectum !!!
Et hop !
Quelques fèces délogées,
Et déjà l'aliéné les pétrit.
Et bien ! Grassement !
Des menottes aux quenottes
La matière fait son chemin.
O faste de répugnance !
Je déglutis ma propre fiente !
Souillure, souillure, et ma purification, alors !
La créature brenneuse est immonde !!!
Doux Dieu, faites que je la dégueule.
Sang, vomi, étron :
Voilà de quoi créer, mon Eon !

Foutre, où est le sexe ! L'Eon, le cierge en main, active la flamme. L.'Eon, le cube en coin, sème des spasmes brûlants. L'Eon, de­vant le cube, serre des pouces le cierge qui fond. L'Eon, devant la glace, presse le cierge et furieusement éjacule ; cloîtré en un coin, je presse une peau d'où saute le bourbillon. Émergé d'un songe, le coin des prunelles encore chassieux, je regarde couler le pus sur la glace.

Foutre !