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Laurence GUILLON

L’arche

Le monde s’ouvre en deux comme un crâne brisé
Et coulent les ténèbres, avec le sang versé,
Où se noient tous ensemble les bêtes et les gens
De peu nombreux coupables et beaucoup d’innocents.

Et tout est bien parti, comme on l’a raconté,
Que quelqu'un commence et tout le monde s’y met.
Au début l’on proteste, puis ensuite on se tait
On n’a plus rien à dire, on ne sait que choisir
Prier ou bien se battre, rester ou bien s’enfuir.

Les ombres déchaînées ont trouvé leur visage,
C’est le vôtre, vous tous qui avez mis en gage
Votre âme dérisoire chez le grand usurier
Qui jamais ne rendra ce que vous lui bradez
Contre l’argent des autres et contre un vain pouvoir
Ou de tristes revanches. Et dans l’océan noir
Que si facilement vous avez soulevé,
Plus sûrement que nous demain vous sombrerez,
Et plus profondément, bouffons et viragos,
Assassins et voleurs, jusqu’au tréfonds des eaux.
Pleins de cris, de noirceur et de sinistre effroi
Vous n’emporterez rien dans votre tombeau froid
Que la grise charogne où votre âme a péri,
Squelettes habillés qui offensez la vie.

Et nous dont vous broyez les humbles destinées
Nous guettons sur la grève la grande arche invisible
Dont vous ne verrez pas la lumière épanchée,
Et nous irons dedans ses flancs insubmersibles
Avec tout notre amour, nos cœurs émerveillés,
Et peut-être aurons-nous alors, de vous, pitié…

Cavillargues 2014