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Julien BOUCHARD-MADRELLE

Joies montagnardes

Indescriptible odeur du sentier de montagne !
Alpages généreux couronnés de sommets,
Je vous aime bien plus que toutes les espagnes,
Que l'Inde, le Tibet, vous si loin, désormais !
Un village rustique aux toitures de lauze
Au fond d'une vallée où serpente un torrent
M'émeut autant que Rome ou Venise la rose
Avec tous leurs palais et tous leurs monuments !

J'aime tous ces vallons aux pentes verdoyantes
Où il fait bon flâner, où il fait bon rêver.
Au milieu du concert de la vie palpitante
Un coeur, même blessé, ne peut que s'élever !

Sous les escarpements, les glaciers superbes,
Tout un peuple de fleurs, à la belle saison,
Se mêle aux graminées qui font de blondes gerbes.
C'est là que la marmotte a creusé sa maison.

Tout l'été elle fait bombance de verdure
Et son cri est partout répété par l'écho.
On la voit se dresser, prudente créature,
Dessus la pente herbeuse ou le rocheux chaos.

Chamois et bouquetins, en bonne intelligence,
Vivent à ses côtés ; seuls l'aigle et le vautour,
Ces graves empereurs qui planent en silence,
De leurs grands yeux perçants, la traqueront toujours !

Furtive par moments, tout autant que l'hermine,
Elle veille avec soin sur ses joyeux petits
Qui se roulent dans l'herbe auprès de la Tarine
Broutant l'or de la terre avec force appétit.

Comme des traits lancés par des archers habiles,
Les chamois, sans trembler, dévalent l'éboulis.
Loin de l'air corrompu qui étouffe les villes,
Ils courent en tous sens et je reste ébloui !

Certains soirs on entend s'entrechoquer les cornes
Des vaillants bouquetins, défendant leurs amours :
Cela résonne au loin, là-haut - ô joie sans borne ! -
Près des torrents grondants pleins de rocs en leurs cours !

Auprès des centaurées, des lys, des épilobes,
Au milieu du concert des criquets bondissants
Et devant ces sommets dont la beauté m'absorbe,
J'aime flâner longtemps, l'esprit tout frémissant.
Je contemple les monts, j'observe les nuages
Et j'ai le sentiment que le temps, ce voleur,
A stoppé pour jamais ses austères rouages
En ces lieux où je laisse une part de mon coeur.