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Julien BOUCHARD-MADRELLE

Douce et furieuse sensibilité

Quand le vent sur mon front dépose ses baisers
Telle une muse chère invisible et légère,
Quand le soleil sur moi tel un habile archer
Lance mille rayons souriants, de lumière,
Quand la pluie qui murmure en touchant le feuillage
Vient rafraîchir mes traits et quand l’arbre, vieillard,
Me parle sans un mot du long fleuve des âges,
Mon cœur est en éveil, je prie le dieu des arts !

Quand la mer, face à moi, orgueilleuse étendue
Répète sa chanson, beau chant d’éternité,
Quand l’alouette vient, de l’éther descendue,
Se poser près de moi parmi les graminées,
Quand le temple écroulé résonne de mes pas
Lui qui vit sur ses murs l’ombre des grands, des sages
Quand la belle transforme un regard en appât
Pour que mon cœur bondisse, alors jusqu’au nuages
Mon âme, s’évadant, monte et vibre et vraie lyre
Emplie tout mon esprit d’accords, divin langage
Mélodies inconnues que j’essaie de transcrire.

Quand un raz de marée extermine et détruit
Quand un homme haineux lève une armée pour nuire
Quand une épidémie se répand et qu’on fuit
Et quand la calomnie, l’honnête vient détruire,
Mon âme jusqu’au fond d’un abysse est plongée
Par la désespérance elle est toute rongée
Mais elle se relève afin de s’indigner
Car ce serait mourir que de se résigner !
Alors pleine de rage elle maudit le sort
Elle montre du doigt, elle tonne, elle mord !

La sensibilité est mon arme et ma croix
Elle élève très haut ma pensée et la berce
Ou bien sans prévenir, tout à coup la foudroie
Et de mille poignards, la traîtresse me perce !
Elle accompagnera le rêveur que je suis
Jusqu’au tombeau glacé, elle qui est sortie
Du berceau, avec moi, quand j’appris à marcher.
Je ne pourrais jamais, il est vrai, l’arracher
Autant donc m’amputer d’une part de mon cœur !
Modérer son empire, éviter sa fureur
Quand les tristes pensées assaillent mon esprit
Voilà ce qu’il faut faire et quand elle sourit
Y goûter pleinement jusqu’à la griserie !