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Jerome JOLLY

Lettre à l'Océan

Tu me manquais tellement. Pourtant à seulement quelques pas de moi,
Silencieux, immense, je te sais si proche, car oui tu es là.

Cette faible distance vois-tu, ne me paraissait plus infranchissable.
Alors ce matin, je suis parti, dans les tourments du jour méprisable.

Et seul sur le chemin, je force ce corps, chaque fois plus douloureux,
Ce vaisseau si lourd que l’on nous impose, à s’ébranler d’un pas affreux.
Mais je pense tant à toi, et seul sur le chemin, je force ce corps.

Autour de moi il y a cette vie, ces spectateurs qui me provoquent,
Dans la douce brise de septembre, pendant que le soleil se moque.

Car oui tu sais, il rit de me voir ramper, brisé sous son médaillon,
Il s’esclaffe de me voir me démener, larmoyant dans mes haillons.

Si seulement il savait, si seulement il comprenait, que sans toi,
Il n’aurait personne pour le contempler, sur cette terre aux abois.
Oui, sans toi. Si seulement ils savaient, si seulement ils comprenaient.

Alors j’avance, je me rapproche, oubliant les douleurs qui abondent,
Je poursuis la route et déjà je te sens, parfois même quand tu grondes,

Je t’entends m’appeler, dans un terrible, sourd et profond postulat.
Soudain je te vois, blessant ce rivage dont tu te joues, posé là.

Étendue, majestueux, invincible, comme attendant ma visite,
Tu ondules doucement, te moquant bien de cet astre qui lévite,
Prêt à m’accorder un asile, étendu, majestueux, invincible.

Léchant ce qui reste de ta fureur, quand dans tes effroyables joutes,
Tu as su briser, broyer, ces imposants rochers qui barraient ta route,

Faisant d’eux une douce couverture bordant ta couche aujourd’hui,
Que tu m’offres en délicate assise, pour soulager mes appuis.

Et je m’assois là, face à toi, comme un ami, heureux de te revoir.
Je te respire, je t’écoute, j’observe tes ondes se mouvoir.
Mon abandon n’est plus, et je m’assois là, face à toi, comme un ami,

Quand enfin, l’astre tantôt si persifleur ne peut plus rien contre moi.
Tu es là. Que ne donnerais-je pas pour exister sous ton pavois,

Dans les profondeurs de tes silences, loin de la folie de l’humain,
Me laissant bercer par tes lames, sans plus craindre un nouveau lendemain.

J’aurais vécu baigné de ta nature, sans jamais subir l’absence,
À mon souffle tu aurais accordé, une éternelle renaissance,
Au gré de tes fières marées, j’aurais vécu baigné de ta nature.

Alors doucement tu te retires, puis sans bruit, tu reviens vers moi.
Tes embruns ont la caresse d’une mère, tu m’inondes de joie.

Dans la grâce de tes flots, j’entends ta prière, et sur mon front baissé,
Se dessine l’amère. Il me faut retourner, toujours le cœur blessé.

Bientôt je reviendrai, sans arrêter mon pas, et tu pourras me prendre,
Me ravir à la vie, cacher mon corps au plus profond de tes abysses,
Mon âme sera de tes pêchés contre ces hommes qui te meurtrissent.

Jérôme Jolly.