Ze Prose. Un Faune à l’Automne
“- Savez-vous pourquoi tombent, sèches comme des larmes,
Les feuilles écarlates de ma forêt ?”,
Dit le Faune à la Nymphe,
Qui faisait ricocher des galets sur le lac,
Sous les ramures rousses d’été,
Marchant à pas sûrs vers la tombe.
“- Vous allez me narrer”, rit la fausse ingénue,
“que vos verts centenaires,
Exprimant leur peine de me savoir sur le départ,
Déposent à mes pieds un frissonnant tapis.
Et vous ajouterez que seuls eux compatissent
Et vous plaignent eux seuls.”
La Nymphe au cou d’ivoire,
Fragile figurine et frimousse mutine,
Butinant du regard l’âme offerte du Faune,
Sur un rocher bondit et,
Les cheveux au vent,
Dans sa robe diaphane, moqueuse ballerine,
Mima un pas de danse.
“- Vous me direz aussi que vous êtes le feu
Tandis que je suis l’eau,
Que vous êtes la terre tandis que je suis l’air,
Légère, insaisissable.”
“- C’est plus simple que ça :”,
Se vexa le velu aux oreilles pointues,
“elles sont toujours tombées à l’automne arrivé.”
“- Vous n’êtes pas galant.
Ce n’est guère élégant et bien peu poétique.
Vous auriez dû mentir, m’inventer un beau conte,
Me faire un brin de cour.”
“- J’aurais pu vous parler du sang qui bout et bat,
Faisant vibrer mes tempes, tel un tambour du temple.
Vous vous seriez moquée de mes pauvres propos.”
“- Oui, je vous l’avoue.
Mais, malgré mes sarcasmes, j’aurais rougi de joie.”
“- J’en avais le désir.”
“- Pourquoi se retenir ?”
“- Pourquoi m’avoir nargué ?”
“- Alors vous m’aimez bien ?”
“- C’est tellement évident.”
“- Vous ne l’avez pas dit.”
“- Oh ! Ce qu’on ne dit pas est parfois plus parlant
Qu’un discours monocorde, des propos monotones.”
“- Vous viendrez cet hiver visiter ma caverne.”
