Je sais l'ennui profond de l'insolente perfection Et le regret du vent planant sur la plaine insipide, Sans le moindre rocher où s'écorcher les ailes.
Sous des cieux ricanant de ce vœu d'intransigeance, Le refus permanent de tout assonant défaut Fait aujourd'hui haïr ce que demain regrettera.
Dans l'oubli vont, à jamais, les anonymes Transparents et lisses comme le verre, Effacés au tableau noir par le souvenir D'irritants personnages, piments des jours affadissants. Dans le tamis du temps, seuls restent Le comique du bizarre particulier Et le cocasse de leur esprit tracassier.
Alors, le regret distille sa savante sève amère, Baiser venimeux et brûlant de l'ortie et, Dans sa toile poisseuse, les jours passés s'empêtrent, Aigres grelots tintant et agitant La maigre dépouille des fêtes défuntes.
Battant le pavé lisse et propre des rues désertes, Bordées de maisons semblables et impeccables, L'humble passant est mal à l'aise.
Son regard n'accroche aucun détail, - tache sur un mur, volet écaillé, Jalousie dont une lame est brisée ou décalée -, Et rien ne rompt le charme dérangeant De l'impersonnel ordonnancement.
Je sais l'ennui profond de l'inutile perfection Et le regret des mares esseulées, Lasses du reflet toujours bleu De cieux ignorant les nuées, Lasses d'être l'onde lisse Et répudiée par les pluies ou l'orage.
