Souvent pris de folie, Je m'en vais dans un bar avaler sans passion, Mais sans remords, Des verres ne rimant à rien.
Je contemple, attristé, le spectacle effarant D'une foule qui boit Et qui noie sa rumeur dans la fumée épaisse, De discours hésitant en délire éthylique.
Les yeux soudain se voilent, la pensée est confuse ; Le rire à contretemps n'a même plus d'excuse : Voyez-les s'agiter, dans leurs rêves liquides, Ces buveurs insoumis, comme un oiseau en cage.
Ils dépassent, hélas, le lieu serein du songe, La frontière ténue du bien-être total, Et sont avalés par l'amère déchéance Des phrases ânonnées, presque incompréhensibles.
Alors, ils se retirent, tel un fauve blessé, Qui voit dans la savane, sans espoir, S'échapper la proie tant convoitée.
