Dans les moments radieux du plus complet bonheur, Avez-vous remarqué, planant haut dans les cieux, Lugubres et silencieux, d'ignobles charognards, Qui, patiemment, attendent que l'instant se finisse, Pour ramener leurs peines et leur fausse compassion, Exhumée de leur manteau de deuils, Faisant bruisser leurs ailes, brunes plumes d'ébène ?
Ils sont comme une brume qui voile le soleil, La mouche voletant autour du met exquis, Ou le bouchon flottant sur le vin d'ambroisie ; Ils ne sont là que pour nous gâcher le plaisir Et rappeler que ces instant trop brefs Ne sont que des éclairs dans une trop longue nuit.
Tels des vautours puants, alignés sur un fil, Ils attendent ; Ils attendent, certains de plonger goulûment Leurs becs acérés dans nos cœurs, nos entrailles.
Tout instant de bonheur est un profond tourment, Habité que nous sommes par cette certitude Que les joies, les plaisirs, sont comme l'allumette Qui brûle et se consume.
Dans l'ombre trop profonde où nous marchons sans but, Nous les croyons des phares ; Ce ne sont même pas de maigres, pâles torches.
Et, le bonheur se voile, comme un regard soucieux, Marqué à tout jamais du sceau de l'éphémère.