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Jean-Pierre LASTRAJOLI

Ze Prose. Le Un et le Multiple

(titre emprunté à Erik Hornung)

J’ai parfois, en lisant,
La sensation curieuse qu’en mon âme limpide,
L’auteur s’est abreuvé, tel marche un promeneur,
Très irrespectueux, dans le vert sanctuaire,
Dans le temple sylvestre, intrus fort dérangeant.

Effroyable vampire, il a sucé mon sens,
Trempant sa pâle plume dans le rouge encrier,
Et traçant sur la vierge des maux plaints de mon sang.

Il a lu dans mon cœur,
Et je me sens plus nu que Lady Godiva,
Qui sur son cheval va, vêtue de ses cheveux.
Tout lecteur comprendra,
- car les lecteurs sont frères par l’encre et le papier -,
Ce trouble délectable, cette quiétude infâme.

On ne sait plus vraiment quel est celui qui lit :
Est-ce l’auteur en nous qui réécrit ces pages,
Ou le scribe proscrit qui saisit l’invisible ?
Puis, on se ressaisit, pensant avec raison,
Que le poète invente,
Ignorant son miroir, sa copie de résine,
Et qu’il écrit pour lui, le premier des lecteurs.

Toujours est-il qu’on songe, véritable mensonge,
Qu’en notre cœur ouvert, il a lu des passages.
Mais ce qui nous dérange, tout en faisant plaisir,
C’est de penser qu’à travers un si vaste univers,
Enfin et hélas,
Il n’est pas d’être unique.