Ze Prose. Le Mort en sa Demeure
Par un chemin tortueux que j'avais emprunté,
Au hasard d'une humeur vagabonde,
Par cette bande serpentant à travers
Les rochers granitiques et de hauts buissons épineux,
J'étais parvenu,
- non sans surprise -,
à l'entrée d'un mystérieux cimetière,
Apparemment abandonné.
J'entrai,
Hésitant, mais fasciné,
Et j'avançai, dans le dédale de ronces et de fougères,
Marchant parfois sur quelque tombe couverte de mousse,
Tapissée de lierre,
Buttant aussi sur des croix de pierre brisées,
Dans leur végétal écrin.
Une chapelle funèbre, dont la grille était ouverte,
Contenait un caveau en son centre,
Dont la dalle avait été déplacée ;
Un cadavre,
Aux ongles acérés et à la chevelure très longue,
Gisait, en sa vaniteuse demeure,
Drapé d'un costume du dimanche, d'une macabre élégance.
Ainsi nous serons tous un jour,
Puantes caricatures, ridicules charognes endimanchées,
Et nos mensonges,
Et nos pêchés ne nous serviront plus à rien,
Quand la vermine chiera sur nos habits,
Le festin de nos corps pourris.
Par cette pensée soulagé, je refis le chemin inverse,
Pour retrouver le monde éphémère
Et grouillant des vivants qui paradent,
Dans leurs costumes et dans leurs maisons de campagne,
Dieux passagers gonflés d'orgueil.
