Je me pique souvent de savourer des mûres Je me pique les doigts lors de cette moisson Et j’aurais bien besoin de porter une armure Pour ne plus écouter persiflant sa chanson Le merle me raillant dans l’ombre des ramures
Le seigneur des ronces picore les buissons Il est dans son jardin et rit de mes blessures Je m’écorche et il chante un air à sa façon Gai de me voir peiner avec mes meurtrissures Tel un ami moqueur qui nous fait la leçon
Absurde naufragé qu’un faux passé consume Tes regrets sont poison qui gâte ton présent Ce qui n’a pas été génère une amertume Altérant ce qui est d’un venin déplaisant Ce qui pourrait naître endosse un noir costume
Tu traverses la vie en blasé suffisant Sur le flot des damnés rongé d’un spleen posthume Tel un Atlas ployant sous un monde pesant Tandis que le nocher canote sur l’écume Et que tu dis tes vers aède ironisant
Tu m’ennuies beau merle clamai-je en me piquant La vie est un maquis tout hérissé de ronces Qui nous blessent les doigts d’aiguillons mordicants Sitôt qu’on veut glaner des secrets la réponse D’un vrai sens à la vie un sens tout expliquant
Mange les baies sucrées et aux questions renonce M’indique le merle sifflant son air plaisant Le bilieux ne devient jamais seigneur des ronces Nigaud profite donc de chaque instant présent Doux-amers sont les fruits de cette vie absconse