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Jean-Pierre LASTRAJOLI

Les Chroniques d'Impelyon. 17. Le lent décès d'Hercine

J’entends une voix m’appelant, dans les bois dénudés,
Mais dont les mots, saccadés par le vent,
Deviennent d’inintelligibles syllabes.
Je me guide au son modulés,
Implorant un secours si long à venir,
Qu’aux berges des empires damnés, la barque envoie déjà
Les cercles parallèles des ondes de l’étrave.

“- Hé, l’ami, par ici, vite !”.
Un homme, prisonnier d’une cage rouillée,
Est livré à l’appétit féroce des harpies,
Ces cruels oiseaux carnassiers.

“- Ne tentez pas de me sauver :
Le nocher noir vient me chercher, vil marchand d’éternité ;
Debout à la barre, sous des cieux aveugles,
Il fend l’eau grasse, car c’est mon tour,
- mon tour hélas !
Qui se souviendra de moi ? Je n’ai pas eu le temps...”.
Il laisse échapper une lettre destinée à ses amis.

“- A quoi bon ? Comme lui, ils sont tous morts.
Hercine n’a plus d’amis !”.

Everland agite sa marotte, dans son pourpoint bariolé,
Fleurant bon le bois de santal.
“- Ils ont renversé les Rois Dieux d’Argobal,
Aux noms sucrés de Justice & Liberté ;
Mais tout pouvoir porte les germes de sa mort,
Nourrissant de nouveaux tyrans.
Il n’y a plus place alors pour les remords
Et il est vain de vouloir clamer la vérité.
Aux noires périodes de l’histoire,
Il faut se taire, et se faire doucement oublier.
Les nouveaux maîtres d’Argobal ont tout brisé et tout pillé,
éliminant, sur les pelouses, les fleurs
Qui viennent à dépasser
Et qui, un jour, vont trop briller.”