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Jean-Pierre LASTRAJOLI

Jadis et Bientôt. Tableaux effacés

Les images d'un film semences de mémoires
Font germer de l'oubli du limon de l'histoire
Des gestes d'un passé englouti par le temps
Coulée basaltique scellée depuis trente ans

Le maître d'école prenait dans le placard
Un placard gris-bleu au ton terne et blafard
Une poudre bizarre ou alors un liquide
Qu'il versait tout au fond d'une bouteille vide

Puis il la remplissait d'une eau limpide et pure
Et une encre bleue nuit livrait sa flamme obscure
Que sont-ils devenus tous ces blancs encriers
Céramique si douce et caresse oubliée

Dans le trou du pupitre à peau de bois rugueuse
On les glissait tremblant d'une peur religieuse
Calée au fond d'un creux la gomme rose et bleue
Côtoyait des objets aux noms souvent curieux

Le crayon H2B le porte-plume en bois
Plumes sergent-major bout de métal sournois
Retenant trop peu d'encre ou alors beaucoup trop
S'accrochant au papier lâchant soudain son flot

Et faisant sur la page un merveilleux pâté
Que le papier buvard à la peau tachetée
D'un coin immaculé avalait goulûment
Nous avions fabriqué ou du moins les mamans

Quelques marionnettes et je pris l'écritoire
Pour le clown la danseuse j'écrivis une histoire
Certains firent la scène d'autres les décors
Ou mirent une âme dans des corps encor morts

Hélas Je n'ai pas vu la représentation
La grippe m'enleva cette satisfaction
Dans ce flot bouillonnant les images se mêlent
Et dans ce désordre soudain je me rappelle

Tout comme les autres j'attendais impatient
Qu'arrive vendredi et ces mots enivrants
Bon il est quatre heures Nous rangions nos cahiers
Fermions nos cartables et restions bras croisés

Le maître nous lisait La Guerre des Boutons
Et alors avalé par l'imagination
La salle de classe s'évaporait soudain
Nous étions transportés les armes à la main

Près de Tigibus dont la Franche Comté
Se vêtait de maquis par notre volonté
Dans la sombre forêt marchant au clair de lune
Avec l'épée en bois pour unique costume

Voilà ce que me dit le flot de souvenirs
Sans trop les déformer et sans trop me mentir
Car le temps ne retient que ce qui lui a plu
Ecartant sans remords les chagrins superflus