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Jean-Michel BOLLET

Tout s'achète et tout se vend

Vous avez entendu comme moi que l’argent
Pouvait tout acheter et vendre l’âme au diable
Mais si l’en est ainsi, demandons à l’agent
De dresser un constat le fût-il à l’amiable

La rumeur nourrit le rusé bonimenteur
Qui est surveillé grâce à Dieu par la police
Pouvant infliger une amende au tourmenteur
Dont un complice met le fragile au supplice

Qui est par chance aidé par les us et la loi
Humaine et divine qui combattent la pègre
Même Dagobert roi et le bon Saint Eloi
Se mettaient à l’endroit où errait l’âme intègre

Vous n’avez peut-être pas entendu que l’or
Etait moins prisé que l’espèce de liquide
Qui ne se voit que dans le cil battant alors
D’accord pour me payer avec un rein solide

Tout s’achète et se vend, beuglait Gilbert Bécaud
Parti quand finit sa batterie électrique
D’user ses cent mille volts au gré des bécots
Donnés pour que baisse son acide gastrique

Il ne lui reste rien à part le souvenir
Qu’il a laissé au cœur de celui qui l’écoute
Et ne peut plus avoir et voir les sous venir
Sans que là où il est désormais ça lui coûte

Les vers se moquent des humains qui furent vers
Et redeviendront vers comme eux et la poussière
Se chargera de les renourrir leur travers
Recommenceront dans un éclair de lumière

Et s’abattront en corps les affres de la nuit
Illuminée par les pâles étoiles blanches
Et mourront encore l’Indien et l’Inuit
Sur la terre où l’argent ruisselle sur ses hanches

Et où l’or ne lui sert qu’à suivre son filon
Qui se faufile dans l’épaisseur de sa strate
Sans comprendre pourquoi nous terriens défilons
Derrière un minerai à l’existence ingrate

Et le diable rira rira bien le dernier
Quand Dieu le grand perdant versera mille larmes
Sur l’incongruité de l’immense charnier
Toujours renouvelé quelles que soient les armes

Et pourtant les âmes mortes vivent en corps
En se nourrissant des vers et de la poussière
Qui furent des corps en renaissant en accord
Avec l’inflexible et éternelle lumière

Dont le rayonnement tance l’obscurité
Peuplée de cauchemars où l’or jaune s’argente
Et pend à un fil de fer de sécurité
Cassant quand avec le jour la lune tangente

Et s’en va blanchie par sa veille s’endormir
Dans un jardin sans faim aussi dépouillé qu’elle
Et se ferme aux voix qui ne cessent de gémir
Sur terre où se soignent des jours noirs la séquelle

Vous savez maintenant comme moi que l’argent
Vend la main le tenant et achète à ce diable
De Satan sa sale âme en vue d’un détergent
Usé par un agent au prix négociable

Tout s’achète et se vend sauf une aile de vent
Qui vole avec celles des oiseaux de passage
Ne s’attardant pas sur le lavement devant
Rendre les puretés douces au repassage

La semelle du fer est en acier trempé
De vapeur qui glisse chaudement sur le linge
Aussi gris que froissé après avoir rampé
Sur le dos des beautés supportant l’homme-singe

Qui ne peut s’empêcher de délaisser son bois
Entouré d’arbres droits aux massives racines
Pour s’aller oublier dans les bars où il boit
Du raisin fermenté aux fièvres assassines

Pendant que la femme vache et son mari bœuf
Prennent soin du fils veau qui tête à la mamelle
Le lait chaud déjà prêt à mêler avec l’œuf
Tout frais que le fermier place dans sa gamelle

En s’exclamant : seigneur ! Ces deux éléments blancs
Me comblent tant et plus dans leur pure nature
Que je désire les conserver dans mon clan
Avec l’herbe grasse et verte de la pâture

Dont l’argent se loge en la rosée du matin
Le bouton d’or naïf ignorant qu’il est riche
Foulés tendrement par berger, vacher, mâtin*
Accompagnés des mets placés dans la bourriche.

Ici, rien ne se vend, ne s’achète ou se prend
Mais s’échange avant que décidé, il se donne
Et ainsi à Satan un paysan apprend
Qu’un sang impur n’est pas bu par la belladone.

* Espèce de chien