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Jean-Michel BOLLET

Salauds de pas

Où allez-vous, salauds de pas ?
A la montagne ? A la campagne ?
Quittez-vous maman et papa
Pour que moi seul vous accompagne ?

Mais, mon chausson en laine est doux
Et la cuisine est excellente
Faite à base de ce saindoux
Qui rend la viande succulente.

Mais, des baisers vont sur mon front
Quand dans mon bon lit je me couche
Et jamais ne me font l’affront
De descendre au bord de ma bouche.

Le Monopoly est le jeu
Pratiqué le soir en famille
Et si je tombe en gare je
Sens que la jambe me fourmille.

Maman veut les petits chevaux
Qui ne requièrent pas d’adresse
Mais je me vois par monts, par vaux
En pensant à changer d’adresse

Arçonnant ma jument au trot
Qui se débride et qui galope
Car son diable lui dit de trop
Bouger sa croupe : ah ! la salope.

Salauds de pas : vous êtes bien
Posés, les deux pieds sous la table
Mais vous ne savez pas combien
Votre maintien est détestable.

Sautez le pas : allez dehors !
Vous n’avez jamais vu Toulouse :
Son rose a la valeur de l’or
Jaune comme est argent le flouze.

Si vous n’osez pas, pas à pas,
Vous lancer dans une entreprise
Ouvrez en grand votre compas
Et tracez-moi une surprise.

Qu’ai-je fait maman et papa
Pour avoir le fuir impossible ?
Est-ce à cause de vos appâts
Placés au cœur de votre cible ?

Dépends-je alors de vos repas ?
Du doux baiser qui m’ensommeille ?
Mais, je rêve, alors, de pampas
Et d’une Toulouse vermeille.

Petits pas, ne me quittez pas ;
Emmenez-moi, je vous emmène ;
Nous serons - les trois - des sherpas
Unis en un seul phénomène.

Pardonnez ma brutalité
Due à l’ampleur aiguë du doute
Qui pompe ma vitalité
Que ma décision redoute.

Je ne vous insulterai plus
Car je sais que l’on se ressemble ;
J’ai déplu et je serai plus
Conscient que l’on est ensemble.

Dedans, le doux, dehors, le dur,
Le domestique ou le sauvage ;
Conclure un marché n’est pas sûr
Entre le risque et l’esclavage.

Et tout d’abord, si on sortait ?
Et demain, d’accord pour qu’on reste ?
Mais, si c’est moi qui vous portais,
Retourneriez-vous votre veste ?

Et puis, tout bien considéré,
La vitre étant blanche de givre
Et mon vieux père sidéré
Que je veuille, ailleurs, aller vivre,

Je révise mon jugement :
Mes très chers pas, je vous demande
D’investir mon bon logement
Fermé au mauvais temps de Mende

Car bien que je sois Lozérien
L’intempérie m’est rigoureuse
Et Toulouse ne me fait rien
Même s’y vit mon amoureuse.