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Jean-Michel BOLLET

Ô Verhaeren

Ô Verhaeren, t’ai-je plagié, t’ai-je copié
En inscrivant dans mon cœur la longueur des plaines
Traversées par des miséreux à pied
Sous des bedaines pleines
De cet alcool si fort et qui endort
Usures, cassures, blessures, meurtrissures
Qui se réveillent quand la lune est d’or
Et que les cors dans les chaussures
Brûlent par le frottis
Des doigts-martyrs sur la chaussette
Jusqu’à ce qu’ils sentent les rats rôtis
Avant de s’arrêter le temps d’une pissette ?
Puis, ô Verhaeren, tu repars
Avec ceux des usines
(Arènes immenses aux immenses remparts)
Qui rêvent de chevaux, de belles limousines
Et de rentrer boire dix bières et pour voir
La marmaille ; les femmes
Accompliront au lit leur conjugal devoir
Et eux sont sûrs que de plaisir elles se pâment
Alors que leurs cris sont
Plus que douleur, dites : souffrance
Et qu’elles pensent à l’impossible frisson
Qu’elles ont tant cherché sur Belgique et sous France.
Voici comme est le Nord
Avec ses canaux pleins de brumes
Qui dissimulent la lune jaune or
Le feu de Dieu qui a enflammé les agrumes
De Nice et de Menton ;
Ô Méditerranée,
Si tu pouvais aller chatouiller le menton
- Juste un petit mois dans l’année -
Des enfants qui se trempent dans l’Escaut
A Gand, Tournai, Anvers ; ce fleuve
D’acier glacé se jette en versant son écot
Dans la mer, Verhaeren, où tu crains trop qu’il pleuve.