Il a été construit un sanatorium Perché sur le quartier dénommé Tilleroyes Et les tuberculeux de Paris et de Troyes Savent que les guette le funérarium.
L’air vif et sain venu tout là-haut est propice A la guérison ou à la rémission Et le bon médecin en-chef de cet hospice Est fier de ses soignants et de sa mission.
Une vingtaine de lits occupent la chambre Des malades parfois assis, souvent couchés, Dans un pyjama bleu recouvrant chaque membre Sous des visages blancs aux yeux effarouchés
D’assister aux montées de toux interminables Qu’ils crachent bruyamment dans la cuvette en fer Composées de glaires rouges abominables Egales au feu de sang qui brûle en enfer.
Nuit et jour, les gorges crient leur détresse rauque Et les veilleurs couverts d’habits immaculés Essaient de soulager dans cet horizon glauque Les malheureux dont peu seront miraculés.
Ils se tiennent à un bras lors d’une balade Livides, si maigres qu’ils paraissent très grands Et marchant à pas lents avec leur vie malade Il lui disent : « Pourquoi moi ? Dis, tu le comprends ? »
Ils s’asseyent sur un banc et le paysage Grandiose, s’étend jusqu’au pied d’un versant En ayant traversé champs, bois et le visage Du mourant se détend : c’en est bouleversant.
Si le soleil rencontre une légère brise Et se mettent d’accord pour choyer un moment Ces « tiges » soumises aux griffes de la crise, Le médecin agit de même ; il sait comment
Avec tact et doigté enjoindre la souffrance De donner du répit à ce pauvre innocent Impuissant à lutter seul pour la délivrance
De ce bacille qui contamine son sang Après s’être infiltré dans un poumon débile Qu’essaie d’extirper sans cesser l’expert habile.