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Jean-Michel BOLLET

Le bâton de marche

J’ai trouvé, par hasard, au fond d’un bas-côté,
Un bâton de marche aux enchères non coté.
Aujourd’hui, je m’enquis d’aller en Normandie
Sous une pluie que le brumeux nord mendie

Mais, je réapparais près de Casteljaloux
Où ma maison vit loin de tel cas, tel jaloux
Et je constaterai après chaque voyage
Revenir bredouille de mon pèlerinage.

Le phénomène se répètera longtemps
Et ma marche ne me rendra jamais content ;
Quand je partis pour la mer méditerranée
Je vis se dresser La Flèche du Prytanée.

J’eus le bénéfice, cependant, de sentir
Repousser mes cheveux - je le dis sans mentir -
Offerts, jadis, à Dieu, en sacré sacrifice
Pour consoler le cœur des porteurs d’artifice.

Je reconnus – c’est vrai - ma mère déjà morte
Assise sur son banc, à côté de la porte ;
Mon père me chanta la chanson des quat’z’arts
En écartant les pans de son large falzar.

Revoilà le tonton et la tata Solange
Priant à genoux le Fils, la Vierge, un bon ange
Pendant que Mac Mahon, invité pour un soir,
Tenait un discours sous les fumées d’encensoir.

Mais, la porte franchie m’imposa de descendre
A la cave où trônait l’armoire en palissandre
Dans laquelle ma sœur croquait du chocolat
Ignorant l’actuel soda coca cola.

J’y trouvai mon grand-père Albert qui dit : « Fiston,
Si tu veux avancer, graisse bien ton piston
Et jette ce bâton qui progresse en arrière
Sans qu’il puisse t’aider à franchir la barrière.

Voilà donc pourquoi je marchais à contre-sens
En pensant peut-être à régénérer mes sens ;
Maintenant, je siffle avec la main dans la poche
En suivant mon chemin même quand il est moche.

L’éther viciant l’air d’un temps de nostalgie
M’avait causé une tragique névralgie ;
J’enterrai mes années de bals et de flonflons
Allégé du bâton de marche à reculons.