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Jean-Michel BOLLET

La rupture

Tu ne sais rien de moi, pas même si je vis,
Et, pourtant, je suis là et t’emboîte le pas
Que je suis pas à pas ; tu ne sais qui je suis ;
Je suis derrière toi et tu ne le sais pas.

Et je parle avec toi mais tu ne m’entends pas,
Tu es trop occupée à vouloir tout semer ;
Je te dis Barcelone et ses bars à tapas
Que l’on fréquentera juste avant de s’aimer.

Et je chante avec toi : connais-tu le couplet
De « Salut les copains » c’est une nouveauté
Passée à Europe un, (bon dieu qu’elle me plaît !)
Le tube de l’été pour qui l’on a voté ?

Je t’interroge pour savoir si tu es seule
Car, personnellement, je suis de ton avis :
Faisons attention à la trop jolie gueule
Capable de briser la vie des cœurs ravis.

Comme je suis heureux de partir en voyage
Avec un guide – presque – à suivre aveuglément ;
Ensemble, nous formons le meilleur équipage
Pour traverser à la nage le lac Leman.

Tout le devant de toi par malheur est caché
Au suivant obligé de lorgner ton derrière
Et le coquin qui te croise n’est pas fâché
De pouvoir admirer ta beauté meurtrière.

(Je ne peux m’empêcher de penser à l’enflure
Qui prétend un regard ou une attention ;
Il n’est qu’un canasson à la grossière allure
Manquant d’entraînement, de compétition).

Je rêve de plonger dans tes cheveux qui moussent
Le peigne de mes doigts écartés pour sentir
Les boucles rousses et les crans, les plis qui poussent
Sans sembler jusqu’à mi-dos vouloir ralentir.

Je continue ma veille et ne te lâche pas,
Parfaitement calé sur ton pas cadencé
Et en me régalant de tes nombreux appâts
Je me prends à rêver qu’on s’en ira danser.

Après tout, je sais bien que tu es toute à moi ;
Tu ne peux m’échapper, je suis là, que veux-tu :
Les autres ont perdu, moi, j’ai pris tout de toi :
Je te vois dévêtue, je sais, je suis têtu…

Et tu fais comme si tu m’ignorais encor !
Patient, j’ai le temps : je peux te démontrer
Mon pantagruélique appétit de ton corps ;
Tu lis dans mes pensées : veux-tu me le montrer ?

Ton oreille a tremblé et par le cou tu tords
Ma proposition de toute honnêteté ;
Je me dis en mon for que tu as quelque tort
D’imaginer que j’en veuille à ta chasteté.

Soudain, tu m’offres un cadeau de premier choix
En projetant ton ombre à mes pieds fous de joie
De pouvoir t’habiter ; me voici sous ton toit,
Dans ta propriété où tu deviens ma proie.

Et, dans le même instant, je viens de me damner
A humer un parfum parti je ne sais d’où,
(De ton cou ?) dont mon nez flatté va le mener
A le conserver pour nos prochains rendez-vous.

Dis, beauté, c’est assez, je vais te suggérer
Cent quatre-vingt degrés à pivoter sur toi !
Mais, tu ne réponds pas, tu as accéléré :
As-tu si peur que ça d’être folle de moi ?

J’espère que tu sais ce à quoi tu t’exposes :
Nous ne marcherons plus sur le même chemin !
Cet incroyable orgueil à dédaigner les roses
Que j’allais te cueillir précipite ta fin.

Tiens, tu te profiles, tu traverses la rue :
M’auras-tu un peu vu ? tu disparais ? tant mieux !
Tu as cassé le fil, le câble de la grue
Apte à te soulever pour t’envoyer aux cieux.

J’ai décidé après m’être bien comporté
De t’annoncer la fin, la terrible rupture
De notre amour si jeune et déjà avorté
Par ta crainte insensée d’une unique aventure.