Vos
poèmes

Poésie Française : 1 er site français de poésie

Vos<br>poemes
Offrir
ce poème

Jean-Michel BOLLET

La révolte

Ils sont rassemblés pour une révolte
En une armée de deux cents combattants
Qui trépigne sous un ciel éclatant
Dont cent paysans privés de récolte
Et un gringalet qui, muet, attend.

Chacun éructe en exhibant sa langue
Chargée de vin rouge et de soupe aux choux,
La joue flasque aussi qu’un vieux caoutchouc
Et voilà qu’un gars titubant harangue
La foule en beuglant « on veut des cachous » !

Puis un chapeauté : les grands, qu’on les pende !
Un autre reprend : pendus, haut et court !
Pas de long procès, donc pas de recours !
Que la nouvelle partout se répande :
Je suis le juge et vous êtes la cour !

Mais, le maigrelet soulève l’index :
On peut éviter l’insulte et l’outrance
Dans ce beau pays où naquit la France
Créateur de lois : dura lex sed lex
Et un formidable élan d’espérance !

Le soûlographe dit : n’écoutez pas !
Vous, les paysans courbés sur la terre,
Vous, les artisans au travail austère,
Sautant ci et là, un maigre repas,
Claquez-lui les dents pour le faire taire !

Venez avec moi, allons tous ensemble
Faire enfin la vraie révolution
Qui apportera la solution
Au peuple qui sait, quand il se rassemble,
Agir sans gants et sans précaution.

« La peau sur les os » dit : je vous en prie
Gardons notre bon sens et la raison
Sans prêter l’oreille à cette oraison
Qui met la tête dans la griserie
Et rentrons chacun dans notre maison

Où la mère entoure un beau brin de thym
De persil et de laurier pour la soupe
Avec l’échalote et l’ail qu’elle coupe
En disant, riant : ça rosit le teint
Et mes yeux n’ont pas besoin d’une loupe !

Elle épluchera deux pommes de terre,
Une carotte, un navet violet
Et le riz sera un dessert au lait
Savouré surtout par le prolétaire
Qui cueille en forêt rosés et bolets.

Dites, mes amis, si on reste ici,
On ne pourra pas sentir la cuisine,
Le bois qui brûle et pleure sa résine
Et entendre dire : enfin, te voici,
Je m’apprêtais à lire un magazine…