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Jean-Michel BOLLET

L'ombre

Un jour, je les ai vus et ça valait le coup !
J’en ai vu un puis deux et sont venus les autres
Dont certains récitaient litanies, patenôtres
En agitant des œufs pendus autour du cou.

J’ai gardé mon sang-froid, une main dans la poche ;
J’ai siffloté un air, histoire d’avoir l’air
D’être calme et serein avec le regard clair ;
Mais le plus grand d’entre eux était plus que laid : moche !

Je me suis approché en laissant un bon mètre
Bien que je fusse fort et plutôt courageux
Mais à la vue de ce peuple moyenâgeux
J’ai cherché à savoir qui en était le Maître.

« Moi je suis dans les gris, les gens m’appellent l’ombre
Qui suit tous les vilains, les cerfs et les manants,
Les garçons dans le vent, les malins, les mamans
Et je me repose dès que vient la nuit sombre..

Qui sont ces amis qui vous ont accompagnée ?
- Je les connais si peu, je les ai rencontrés
Au hasard des chemins quand ils se sont montrés.
L’un d’eux était plein d’œufs… une belle poignée.

Il n’en avait que deux attachés à son cou !
- Avouez, cher ami, que ce n’est pas banal
De s’octroyer ainsi de l’orifice anal
Le produit d’un oiseau couvé par un coucou !

- Voyez celui sans bras
Dont le pied droit se tord ?
- Il est dodu et gras
Oui, on dirait un porc
- Moi, j’ai un bac à rats

Vous avez de gros rats parmi tous ces gens-là ?
- Non, mais il s’avère que nous avons des vers
Qui sont, heureusement, moins nombreux les hivers.

Dites… vous les mangez ?
- Oui, ils sont sans danger.

Vous êtes une ombre qui parlez : expliquez !
- Oh ! Les ombres vivent toutes avec le monde…
Je connais des langues de brunes et de blondes ;
Il suffit d’écouter, ce n’est pas compliqué…

Un petit Chihuahua dit quoi quand il aboie ?
- Ca dépend s’il a faim ou s’il craint le danger
Et surtout le moindre rien peut le déranger
Même quand faiblement une flamme flamboie.

L’Apache avec le Sioux, l’Iroquois, le Comanche
Conversent en hauteur de sommet à sommet
Avec une bouffée de fumée qui commet
Des signaux étrangers à un Suisse romanche.

Vous n’avez pas peur de suivre des Indiens ?
- Il le faut bien ! Même des gardiens de vaches !
Ces fameux cowboys qui détestent les Apaches ?
- Et font le bonheur des films hollywoodiens…

Vous paraissez sympa… Vous venez avec moi ?
- Demandez au soleil et voyez s’il accepte ;
Bien sûr, j’oubliais : de lui, êtes une adepte ;
- Oui et sa lumière sait me mettre en émoi.

Signons, ensemble, un pacte :
Moi, je suis colonel ;
Vous deux, passez à l’acte :
On sera éternel !

- Alors, fi du clocher
Seul sur le toit d’église,
Tant pis pour le rocher
Où s’abrite Anne-Lise,
Ainsi qu’au grand cadran
Dont je suis une aiguille
Et tant pis pour l’écran
Que je fais à l’anguille ?

Maître, je te suivrai
Comme les autres ombres
Puisque je suis, c’est vrai
Une ombre entre les ombres ;
L’habitant d’Angoumois,
Le Chinois en grand nombre
Ne peut aller sans moi
Sauf sous la terre sombre.