Vos
poèmes

Poésie Française : 1 er site français de poésie

Vos<br>poemes
Offrir
ce poème

Jean-Michel BOLLET

Immense transhumance

Les renards suivis de la meute de loups gris,
De rennes, d’élans bruns, de grizzlis amaigris,
De coyotes, d’ours blancs, de gnous et de gazelles
Survolés par de noirs aigles aux grandes ailes
Passent à mes côtés, me frôlent les cheveux
Dans un bruit de sabots, sous les galops nerveux
Etouffant les coussins des canidés rapides,
Oreilles plaquées, au ventre à terre, intrépides,
La langue pendante rose entre les crocs blancs
En zigzagant entre biches et faons tremblants
Qui regardent de biais le tournoiement des aigles
En ayant adopté les millénaires règles
Exigeant de ne pas défier la tigresse,
Le tigre, le vautour et la panthère-ogresse,
Le gypaète, le busard et le milan
Qui sont nés il y a déjà plus de mille ans
Après avoir appris par geste et voie orale
La façon de chasser sans souci de morale
Et comment font les fronts frisés de ces bisons
Qu’affrontent les lions, couronnés de toisons
Epaisses comme sont coriaces leurs gueules
Qui d’un seul coup mordent dans le cou elles seules
Suffisamment pour que s’effondre avec fracas
Le si monstrueux mont affranchi du tracas
Certain d’un embonpoint et d’une colossale
Force apte à soumettre l’espèce commensale
Obligée d’accepter son sensible ascendant
Exercé même sur le peuple des sans-dents :
Les najas, les cobras, lunettes et sonnettes
Si prompts à s’en aller quand les places sont nettes
Par l’efficacité bien dosée du poison
Qu’ils inoculent chez les porteurs de toison
Les peaux lisses, les sangs chauds, froids, les souris grises
Les mulots victimes de spasmes et de crises
Exaspérés d’être dérangés à la sieste
Usée à digérer un long ver indigeste
Qui a pu échapper aux pieds des ongulés
Aux sabots cornés à peine dissimulés
Sous les longues jambes fines dans l’herbe haute
S’activant en courant quand un superbe hôte
De la prairie surgit et bondit au genou
De sa proie dont il croit être après coup un gnou
Et pendant que tous les gnous, zébus, loups, panthères,
Piétinent les terres en formant des cratères,
Des araignées velues venues de l’Uruguay
Mordent les sangliers qui traversent le gué
Du fleuve où pullulent un banc de caïmans
Et de crocodiles attaquant carrément
Un dik-dik qui se noie et voit qu’une antilope
Parvient à rejoindre le troupeau interlope
Fonçant toujours plus vite en foulant l’habitant
Du sol d’ici, petit, face à l’exorbitant
Bloc massif comme un roc sans tige et sans racine
Craint par les tranquilles glycine et capucine
Et un aigle vient de serrer un lapereau
Qui se débat mais s’en va avec son bourreau
Bientôt de retour pour enlever la limace
Montée sur l’escargot dont la corne grimace
Et pendant que blaireaux noirs-blancs, lynx, loups gris fuient,
Elans bruns, ours blancs, gnous et grizzli amaigris
Panthères, coyotes, tigres, milans, gazelles
Survolés par de noirs aigles aux grandes ailes,
Un éléphanteau à la queue d’un éléphant
S’en va placidement quand j’entends mon enfant
Me réveiller parce qu’il est l’heure à ma montre.
Calme et rêveuse, alors, la lune à moi se montre.