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Jean-Michel BOLLET

Destins

Bercé d’indolence dans le nid de l'enfance,
On se love, à l’abri, dans un cocon douillet,
Avant la terrible remontrance et l’offense
Des seigneurs du mépris, les adultes rouillés

Qui sont veules et fous, ignorants et méchants,
Construisant constamment des fardeaux de chimères
En nous interdisant nos rêves et nos chants
Abhorrés par le fiel acide des commères.

Et nous voilà saoulés, cognés, abasourdis,
Assommés, avilis, prêts à faire les guerres
Avec des compères qui se sont dégourdis
Au sein de régiments remplis de militaires.

Et l'on court avec la fleur à la boutonnière,
Fusil en bandoulière avec le casque lourd
Sur la tête et pesant comme une bétonnière
Qui remue poudre et eau sans cimenter d’amour.

D’un œil concupiscent, la fille est abordée,
La main sur le cœur, le verbe haut en couleurs,
Mais l’on s’entortille sans qu’elle ait accordée
Un regard et naissent les premières douleurs ;

Assis en table ronde, on se refait le monde :
Moi, Monsieur, je sais tout, "i y’a qu’à, y faut qu’on" ;
On se gronde en disant que la terre s’émonde,
Que l’on doit séparer le verdier du faucon.

Et chacun d’inventer des barbarismes sots
Pour exalter l’âme de pure conscience ;
On cite volontiers Descartes et Rousseau
Et le charme éloquent de la Mère Science.

Soucieux, de ses cieux, Dieu scrute l’être humain
Et en levant le vent et les moussons l’alerte
Que les rosés des prés, le lilas, le jasmin
Mourront comme une herbe sous un sabot alerte.

Les éclairs zèbrent l’air et parcourent l’Espace,
Le tonnerre claque et fait trembler l’univers
Pour lui rappeler que la Sagesse dépasse
Un cœur minuscule et une tête à l’envers.

L’enfant quitta sa mère au début de l’hiver
Et refusa d’apprendre à devenir un homme
En restant à ramper dans la bave du ver
A peine sorti du trou pourri de la pomme.