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Jean-Michel BOLLET

C'est elle !

Je la croisai avec une impression telle
Que je me mis d’emblée à trembler : c’était elle !
Ses cheveux noirs de jais, son front lisse roux-blanc
Donnaient à sa bouche rouge un effet troublant
Et ses épaules sur de longs bras aux mains fines
Etaient aussi rondes que celles des dauphines
Aux rêves de reines attachées à des rois
Repoussant l’intrigante et le ménage à trois ;
La graisse de son ventre était dans son derrière
Qui suivait tout son corps sans faire marche arrière.
Elle me dit « bonsoir » ; je répondis « bonjoir » :
Elle m’avait parlé ! Emu, je dus m’asseoir
Sur le trottoir et son parfum d’amande douce
Flottait et m’enivrait, moi l’homme-nain Tom-pouce
Qui eut l’ineffable et grande joie d’être vu
Par la femme qui est, sauf cruel imprévu
Celle-là même qui caressera ma nuque
Et malgré sa beauté mariera un eunuque
Puisque j’ai décidé qu’elle m’appartiendra ;
Je reste encore assis, bientôt elle tiendra
Ma main, j’en suis certain ; je sais que Seine et Rhône
Ont un destin commun tout comme la Garonne
Mais qu’ils embrasseront (car ils l’ont bien voulu)
La mer qui leur convient, qui leur est dévolu.
C’est donc elle ; je me porte à pas lents vers elle
Qui m’écarte en grognant : « vous faites trop de zèle.
Je vous ai souhaité le bonsoir : c’est assez
Et si la mer me plaît, je hais les crustacés. »
(Quel idée déplacée rapportée à ma taille :
Même un cul-de-jatte peut combler une entaille…
M’avait-elle entendu réfléchir avec force
Sur les fleuves qui vont nus sans besoin d’écorce
S’acoquiner avec des mers, des océans
Eux qui naquirent nains pour devenir géants ?
Qu’importe sa pensée, elle ira où j’habite
Et je lui montrerai la grosseur de mon cœur)
- Faites vite le choix, je le vois, maintenant
Que vous voulez de moi ; voyez ma main tenant
Ce mouchoir séchant la bave de votre bouche
Qui pourrait inonder les draps de notre couche.