Le temps de mourir.
Jusqu'à l'ultime dissolution des doutes,
Dans les dimensions inconnues de l'après-temps,
Au mur des impasses, l'écho des déroutes,
Quand la vie, lassée de notre corps, fout le camp.
Aux écrans d'images d'une vie non rêvée,
S'effacent les amours, aux violences d'argent.
Maître incontesté d'un virtuel sublimé,
L'homme seul suce enfin le sang des dominants.
A force d'être partout à la fois sans frais,
L'illusion parfaite s'installe, au quotidien
D'une maîtrise globale des intérêts
De chaque grain de lumière, au dernier des chiens.
La mort, réduite au rang de probabilité,
Quitte le rayon des certitudes vaines,
Pour l'ignorance de notre fatalité,
A s'injecter un voile noir dans les veines.
Insatiable faim stérile d'une fièvre,
La course, à dévorer tout ce qui se croque,
Pousse l'homme défiance à crever la plèvre
Des poumons feux de ceux qu'il étouffe et moque.
Il ne reste qu'une fraction de seconde,
Pour s'étonner de ce que vivre peut coûter.
Le temps de s'étouffer, en belle faconde,
De quelques mots, au bord de notre humanité.
Comme la mort, le temps de mourir disparaît
De notre paysage bleu des souffrances.
Il n'y a pas de place à ce qui trop déplait,
Dans ce temps repu des frasques de l'errance.
Nous ne prenons plus le temps de mourir en paix!
Si bien que nombreux sont morts déjà, qui se croient
En vie encore' et nous grèvent de leurs débets,
A longueur d'exsangues commentaires, sans voix.
Nous serons tous morts bientôt sur cette Terre,
Continuant à jacasser en virtuel
Sur les écrans bleus de nos armes de guerre,
Dans les discours religieux sur l'être éternel.
