Genre poésie.
La poésie n'a pas de genre.
Féminine, travestie, mâle et virile,
C'est toujours une salope,
Qui se traîne et s'abandonne,
Pour quelques riens, une dose, du vin, un bon mot.
On l'entend partout,
Dans les gouges, les maisons closes,
Chez son voisin, sur le trottoir,
Au libre service et même
Dans les salons dorés de la République,
Où elle s'égare quelquefois, sur la pointe
Des pieds, perchée sur des talons trop hauts,
Difficiles à marcher.
Son souffle sent l'ail parfois,
Mais souvent la fraise ou le réséda,
Selon qu'elle a du dentifrice ou pas.
Elle se parfume, souvent
Au vent du grand large marin et des embruns.
Elle sent aussi la misère
Et ses odeurs de pisses faisandées,
Les jours de grandes marées,
Quand la plage n'est pas assez vaste,
Pour le flot ressac de tous ses souvenirs noirs.
Elle a des jours lumières azuréens,
Plus longs que tous les baisers d'amour,
Bleus, comme un martin pêcheur amoureux.
Elle court, jusque dans la rumeur,
Dans les mots d'enfant souvent.
Elle se prend la poudre d'escampette
Dans la gouaille des accents chantants.
Elle s'oublie jusqu'au profond de la nuit,
Quand les esprits embrouillés fredonnent
Des ritournelles en cocktails de bouches empâtées.
Elle tourne en boucle,
Sur les disques durs rayés
Dans quelques chansons volées.
S'envole ailleurs au lointain oubli.
Se pose en tendresse au coin des solitudes.
Pour finir, se prend parfois
Pour une épitaphe.
