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Jean GALLOY

Pardonner

Il y a des offenses qui font pleurer.

Il y en a qui laissent à demi-mort.

Nul ne voudrait en ce lieu demeurer.

Qui voudrait demeurer dans le lieu de la mort ?

Et pourtant, il faut pardonner.

C'est l'oubli, le mépris,
c'est l'insoucieuse indifférence
qui refusent au cœur le droit d'être compris
le valeur authentique de sa différence
et condamnent sa musique au silence
préférant à la muse offrir leur révérence
Cette offense rend gris.

Mais il faut pardonner.

Il y a l'arrogance
l'écrasante éloquence qui cadence les mœurs
rythmant "à qui mieux mieux"
la rivale colère
qui dans toute atmosphère impose d'être grand
et qui classe au talent
délaissant les petits frères
au bord du chemin des pleurs
fleuve, rivière de galères !
Cette offense lacère.

Mais il faut pardonner.

Il y a le cirque des enjeux
du grand jeu du "Moi Je"
où le fauve à dompter est l'autre dominé
où l'oreille, assourdie à toute altérité
où le regard, aveugle à toute autre beauté
que la sienne
étouffent de leur voix le silence souffrant
du pauvre qui aurait des histoires à chanter
si seulement on pensait à le lui demander...
Et s'il crie on s'étonne "quelle outrecuidance !"
Cette souffrance rend atone.
Aphone.
Oh elle laisse sans voix.

Mais il faut pardonner...

Il y a l'avarice, dégoût sans pitié
pour les pauvres laideurs qu'on aime démasquer
le refus de donner la moindre compassion
et qui entre les âmes creuse des sillons
un Achéron de larmes alourdi de limon
le refus de laver les pieds, de faire honneur
à cette humanité sanglante, qui se meurt
transie de froid, devant la porte des maisons
pour n'avoir pu trouver la chaleur d'un baiser...
Cette offense délaisse...

Mais il faut pardonner.

Il y a l'exclusion, qui coupe le cordon
nous reliant aux frères fils d'un même Père.
cette froide sentence étrangère au pardon
qui chasse la confiance et la jette à la mer.
Il y a cette plaie, qu'on désigne du doigt
pour que l'on soit le feu et l'autre, le bois.
Il y a ce désir d'éloigner ceux qui pèsent
d'écarter celui qui n'avance pas au pas
d'épargner nos égards à celui qui nous lèse
à celui qui nous gêne et que l'on hait tout bas...
Cette offense... abat.

Mais il faut pardonner.

Il y a l'humiliation au front bas
de qui ne possède ici-bas
qu'un semblant de fierté
l'ombre d'une humanité
défigurée.
En face, ces regards qui ne peuvent souffrir
de supporter les traits de la disharmonie
de voir avec le cœur ces Princes de martyre
ces regards qui les bande comme des momies
recouvrant un sourire irradié d'infini
qui contraste avec l'ordre d'un beau défini
mais apaise le cri de nos âmes tordues...
Cette offense en a pendu...

Mais il faut pardonner.

Il y a tant d'offenses en nos âmes blessées
il y en a tant encore
mais il faut pardonner.
Pardonner, par nécessité.

Car de ces maux je suis bourreau comme victime
O Seigneur par pitié, qui connais nos abîmes
qui nous a pardonné autant que fus blessé
donne-nous au cœur le pardon à partager
et que nous renaissions de nos cendres,
qu'au nouvel élan de cœurs tendres,
alliés,
nous nous portions tous sur nos grabats alités
jusque devant tes pieds,
O guérisseur des plaies !