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Jean GALLOY

Le mont blanc (poème en prose)

Sa puissante encolure le distingue, de loin, des croupes hissées jusques à son poitrail. L'Astremont de cocagne domine ces montagnes comme un guerrier sur son pavois. Taïoo ! Cors de chasse ! Entendez résonner dans son coffre profond ces échos d'opéra qui s'avalanchent dans les airs ! Quelle grandeur ne perdrait coeur devant cette voix qui s'allie aux vents jusque dans le tremblement des alpages ?
Bâti en ces hauteurs, irradié de neiges éternelles qui le repèrent au loin, il veille, tel un phare, de son oeil givré d'attente, sur la mer de ce bas haut-pays. D'un oeil de verre fixant les cieux qu'il réverbère à terre. Le vitrail de ses neiges est d'une cathédrale.
Et le dos du Vercors chaloupe sûrement vers le nord. De clocher en clocher la colline s'achemine, et dans la fonte bourdonne l'appel du midi. La corne du pâtre chaque jour redit : j'empoumonne aujourd'hui le chemin de la vie. C'est l'oreille qui le voit et l'oeil ne peut entendre, assourdi par tant d'images. Et je suis ces antennes où s'équilibre l'onde du pâtre qui va, sur le fil des lignes à haute tension. Difficile équilibre, de marcher en tension... Où va-t-on ?
Sapin bleuet qui te promènes, l'épine te malmène. Mais au mont blanc dresse l'antenne de ta flèche tendue vers le ciel. Hé, cathédrale ! Hé grand bouc ! ta barbiche ouvre dans les nuages un îlot de sagesse, un puits de lumière. Coule et dévide-toi, bobine de vie qui tisses l'univers ! O Mont Blanc Gulliver, il est si beau ton univers. La vue est de toi prisonnière, comme la crinière de tes nuages.