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Giovanni BENINI

Les sortilèges de la nuit : Nékuia 1

Une nuit, je suis descendu dans la maison des morts,
J'ai franchi la grille rouillée où des cyprès capturent les songes.
Aussitôt, une tempête de voix s'est précipitée à ma rencontre :
Chuchotements, gémissements, colères et supplications
Débris de désirs inassouvis, de meurtres jamais accomplis,
Atroce tourbillon dans l'horrible abysse de l'éternité
Qui formait autour de moi
L’auréole glauque des saintetés éphémères.
Mes hurlements se joignirent aux clameurs obscures.
C'était l'ivresse chaotique et désespérée
De l'Aleph d'où s'exhale la plainte de Dieu
Qui informe
L'informel refus de façonnement,
Impersonnel et inflexible décret
Du désastre universelFusion confuse où roule le chant de l'abîme

Je participais à ce rite immémorial
Que les langues écarlates des serpents sacrés
Susurrèrent aux chastes oreilles adamiques,
Hymne à la nuit, à l'incréé, aux virtualités démoniaques,
Cortège rampant au bord de l'ombre
Dont la joie féroce rompt les passerelles de l'histoire.
Fuyant, je pénétrais un labyrinthe
Où flamboyaient des miroirs aveugles,
Sosies fracassés des vanités secrètes,
Immonde orgueil tapi dans l'alcôve déserte de l'âme,
Je voyais , des murs lézardés, suinter
Les figures hagardes de mes mensonges,
De mes intrigues nouées aux trames de la peur.
Je courais à perdre haleine
Dans ce dédale de la mémoire des morts
Dont le souffle fétide balaie
Toutes les fausses lumières
De nos précaires arguties,
Il fallait les voir ces mythes solennels
Craqueler sous le poids
De leur inepte suffisance,
Je n'étais plus qu'un corps nu
Au bord du rivage du monde,
Frêle silhouette errante
Cherchant dans ses fêlures
La source amère du mystère de l'amour.