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Giovanni BENINI

Les enfants de Vulcain 1

Pour eux, chaque jour commençait leur nuit
Dans le ventre noir de leur mère antique,
Ils perçaient ses flancs désormais étiques,
Fouillaient ses viscères avec furie,
Grognant et suant, pressaient ses mamelles
D’où suintaient, épais, des jus de ténèbres,
Certains, accroupis crachaient des gravelles,
La chair lézardée comme un pauvre zèbre,
Abattaient, rageurs, des pérats monstrueux
Qui faisaient trembler le sol cloaqueux
Puis, hurlaient tel un cerbère rossé
Dont l’écho profond au loin s’écroulait.
Un cortège de bossus grimaçants
Titubait sur des rails enchevêtrés,
Ecrasé par un fardeau tout gluant.
D’autres, vrais cyclopes hallucinés,
De leur œil jaune cherchaient les fossiles
De ces mollusques mêlés à l’argile,
Parfois, ils trouvaient un elfe apeuré,
Un enfant horriblement sacrifié.
Ils voulaient aussi le réconforter
Avec ces mots doux qui, hier, le bordaient
Mais leurs lèvres terreuses trop collées
Se plissaient de douleur et se taisaient.

Ils venaient tous d’un autre enfer,
D’une prison à ciel ouvert,
D’un abominable désert
Où des scorpions le ventre à l’air
Brûlaient en crissant de colère
Et des nuits froides de l’hiver
Dans des villages de misère
Où les nouveaux-nés qu’on enterre
Ont gardé leur beauté stellaire.
Italiens, Roumains ou Berbères
Chantaient une langue solaire
Aux mille parfums éphémères
Que leur avait soufflés leur mère
Quand ils suçaient leurs seins amers.

On entendait des craquements sinistres
Qui parcouraient, vibrants, ce ciel de bistre
Comme si un immense vaisseau de terre
Voulait se soulever du fond des mers,
Des chevaux aux regards fous se cabraient,
Cherchaient à piétiner quelques fantômes,
Puis, dans le labyrinthe, s’égaraient
Espérant retrouver leur beau royaume.