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Giovanni BENINI

Le comptoir des comptines

Les comptines d’enfants sont rien moins qu’innocentes
Leurs paroles souvent lorgnent vers l’indécence,
Est-ce aux puinés que s’adressent ces outrances
Qui ont l’air composées par quelques mains démentes ?

Où court-il le furet et sa pâle tonsure,
A-t-il vu l’amandier pour y fourrer sa bure ?
Le cardinal Guillaume a retrouvé, Mesdames,
Son joli bois verni quand il lustrait les âmes.

Sous quel chêne feuillu s’est donc séché l’amant
Après s’être baigné dans l’eau claire, gaiement,
A-t-il sifflé longtemps, ce joyeux rossignol
Tandis que les rosiers dansaient la carmagnole ?

Voyez l’ami Pierrot qui s’endort sans ses plumes
Et laisse son Lubin à la chandelle morte,
Battant son mou briquet quand plus rien ne l’allume,
Se ruer chez la brune lui faire bonne escorte.

Quel est ce grand panier tout frétillant de moules
Que les gens de la ville allaient souvent pêcher,
Etait-il en osier ou bien en chair de poule,
Le voilà trop vanné, il faudra le jeter.

Nous n’irons plus au bois pleuraient les vénérables
En humant du laurier dans leurs bouges notables,
Les baisers sont fanés, Jeanne a caché la fraise,
Et la fleur d’églantier s’étouffe dans la braise.

Qui sont ces blancs moutons se prisant les narines
Que presse la bergère au milieu de l’orage,
Perruques et corsets garnissent la cuisine
Et le tison ardent réchauffe le laitage.

Quant au petit navire aux flots, abandonné,
A-t-il été témoin d’un étrange festin
D’un tendron succulent du plus jeune marin
Qui fut fort épicé avant d’être avalé.

Pauvres ritournelles, ce monde est trop cruel,
Voilà quelques refrains jetés aux diablotins
Car leur seule vertu comme la chanterelle
C’est de solfier aigu les exploits du malin.