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Giovanni BENINI

La fête est finie

Elle est venue la fanfare de tous les temps
Le long des platanes, dans la rue en liesse,
Ah ! la belle pagaille, un vrai enchantement
D’entendre la rumeur s’enfler en allégresse.
C’est d’abord un triton qui souffle dans sa conque
Tandis qu’une sirène en pince pour sa lyre,
Que poursuivent têtues les flûtes des satyres
Imitant piètrement de beaux airs qu’elles tronquent
Puis s’avance Aphrodite aux fesses affolantes
Héphaïstos fasciné martèle son enclume,
Dyonisos outré flagelle ses bacchantes
Qui ont troqué son vin contre un verjus d’agrumes,
Valsant sur ses éclairs, Zeus en peau de taureau,
Va kidnapper Europe qui lui garde rancune.
Mais laissons les passer ces Dieux en oripeaux
Qui se gaussent en vain en quête de tribunes !
Car voici les cuivres, trompettes et tocsins
Dont l’ardeur stridente fracasse les nuages
Les bassons si bougons , les hautbois saturniens
Attristent le soleil et ses blonds tatouages.
Les balcons s’ébranlent et la foule piétine
Des limaces vexées, de piteuses sardines
Avec ces trublions, ces gâcheurs de festins
Qui souillent nos trottoirs et mâchent notre pain !
Mais voici les guitares et les castagnettes
Et tous cambrent d’allure, aux odeurs d’omelettes,
Esmeralda se plaint aux étoiles filantes,
Un couteau à la main, la flamme dévorante.
Des orgues ténébreux défient les orages
Leur toccata diabolique vole et s'enrage
Alors, des pénitents font grincer leur crécelle
Haletant pesamment comme des haridelles
Enfin les tambourins flanqués des majorettes
Enflamment les badauds avec leurs pirouettes
C’est soudain la folie, une meute en furie
Et tous les habitants pourchassent le cortège
La foule hébétée, frappée d’un sortilège,
Traverse les fondrières en léthargie,
Quitte le village pour ne plus revenir,
Seuls quelques serpentins frétillent dans l’ornière,
Un chien hurle à la mort avant de déguerpir
Car l’ombre s’avance le long des roselières.