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Giovanni BENINI

Diablerie

Le vent, ce chien fou, s’est tué cette nuit.
Il frappait durement les volets en frayeur
Qui gémissaient longtemps leur souffrance en chœur,
Suppliant le dément de cesser ses supplices,
Il secouait les réverbères qui pleuraient leur lumière
Et chassait le frimas où fuyaient des fantômes.
Ses mains rageuses giflaient
La grande armée des platanes
Qui saignaient toutes ses feuilles,
Se courbant de douleur,
Dans les plaines frileuses, livides de peur,
Il lacérait rudement les buissons et halliers
Où s’étaient réfugiés quelques migrants ailés,
Les collines, d’effroi, se tassaient dans la nuit,
Leurs racines grinçaient comme un galion branlant.
Il courait sur la lande en soufflant les étoiles,
Tel un tigre furieux, il feulait à la lune.
Dans le cimetière, il rôdait, haletant,
Piétinant les bouquets de corolles fanées,
Il ébranlait les stèles, hurlait dans les caveaux
Comme un profanateur qui toise le Très Haut.

Les gens du hameau s’étaient tous réfugiés
Dans la vieilles église dont les voûtes craquaient,
Le chanoine chevrotait quelques psaumes sinistres
Tandis que les vitraux se gonflaient de terreur.
Enfin, un grand fracas retentit dans la tour,
Puis, ce fut un silence qui envahit la cour...
On le vit alors pendu à ce clocher,
Son ombre projetait ses deux cornes tordues
Et des pieds agités, affreusement fourchus,
Quelqu’un dans l’assemblée s’écria, soulagé :
« Le vent, ce fils du diable, s’est enfin suicidé ».